L’île mystère, paradis des poissons

Diorom Bou Mack, un endroit qui se trouve dans l'aire marine protégée et communautaire de Bamboung située dans la commune de Toubacouta. Dans ce lieu mythique découvert, il y a de cela plus de 3 000 ans, des recherches ont permis d’y découvrir 700 cadavres et 128 tombeaux, dont sept de griots. ‘’EnQuête’’ vous fait voyager au cœur de cet endroit méconnu par le commun des Sénégalais.
Pour se rendre à Diorom Bou Mack, il faut prendre une pirogue et faire un trajet d’une trentaine de minutes. Sept kilomètres la séparent de la commune de Toubacouta. Sa superficie est d’environ 6 ha. Découverte, il y a de cela plus de 3 000 ans, l’île est mythique.
En effet, d’après un des noyaux de l'aire marine protégée et communautaire (AMPC) de Bamboung, des fouilles menées en 1939 et en 2001 ont permis d'y trouver des choses intéressantes.
En effet, raconte El Hadj Arfan Ndour, 700 cadavres et 128 tombeaux, dont sept de griots y ont été découverts. C’est la raison pour laquelle on parle de ‘’Gouyou gueuweul) (baobabs pour griots). Des recherches ont montré aussi, selon M. Ndour, qu'on enterrait les personnes décédées sur les lieux avec leurs habits, fusil, bref tout ce qu'ils avaient par-devers eux, quand ils rendaient l'âme. En sus de cela, cet endroit servait aussi aux colons de lieu de transit pour déporter des esclaves capturés dans les villages environnants, avant de les acheminer vers Gorée, vu sa position insulaire.
D’après le conservateur de l'aire marine protégée et communautaire de Bamboung, ce site est plein d’histoire, car il est constitué de succession de coquillages. Il a une hauteur de 12 m et 400 m de diamètre. Le commandant Lamine Kanté renseigne que sur cette île, il y a plus de 7 000 t de coquillages et cinq espèces de mollusque. ‘’Imaginez en combien d’années des gens ont eu à exploiter cette hauteur ! C’est plus de 3 000 ans d’histoire. Il y a eu plusieurs fouilles effectuées dans ce site. Ce qui a permis de trouver des tullistes. C’est des genres de tombeau où l’on enterrait les morts avec leurs bijoux. Il y a des fouilles qui y sont effectuées. Elles ont été arrêtées depuis 2001, à cause de l’érosion constatée. Toutes les recherches se trouvent au niveau de l’Ifan (Institut fondamental d’Afrique noire)’’.
Il ajoute : ‘’Des aménagements sont en train d’être faits sur le site, avec le projet AMPC-Mangroves. Il y a aussi environ deux kilomètres de pistes qui ont été ouvertes. Les aménagements vont être améliorés avec des espaces de repos pour que des touristes puissent avoir un moment idéal au niveau de ce site. Ce dernier est l’endroit le plus visité par les touristes au niveau de Toubacouta. C’est le lieu le plus vendu au niveau du delta du Saloum’’, indique le conservateur lors d’une visite sur les lieux avec une équipe composée de journalistes, dans le cadre d’un atelier de formation sur le traitement des sujets relatifs à l’environnement et d’une visite d’échange sur les AMPC.
Il faut noter, ajoute-t-il, qu’il y a des endroits sacrés pour les villageois qui y viennent. Deux peuples soutiennent que c’est leurs ancêtres qui y sont et ils veulent de temps à temps y aller pour se recueillir et/ou effectuer des prières.
78 espèces de poisson vivent à Bolong de Bambo
Après cette étape, la visite s'est poursuivie sur le site de Bolong de Bambo. Une dizaine de kilomètres sépare les deux localités. Cet endroit aussi a ses secrets. De l'avis du commandant Kanté, c'est une niche de reproduction pour les poissons. Y vivent plus de 78 espèces de poisson et huit de mollusque. C’est le cœur de l’AMPC de Bamboung.
En 2018, selon lui, sur demande de la population, une exploitation de coquillages y a été autorisée. C’est organisé sur trois mois. "Il sert de lieu de reproduction pour les poissons. C'est la raison pour laquelle il y est interdit des activités de pêche, pour ne pas dire que le site est complètement fermé à la pêche. Toutes les autres activités y afférentes aussi sont interdites à cet endroit. C'est une zone de convoitise pour les pêcheurs. C'est la raison pour laquelle il y a une surveillance en permanence. Il nous arrive d'appréhender des pêcheurs qui tentent de forcer, mais souvent, avant l'application de la loi, on sensibilise, on leur explique pourquoi il ne doit pas y mener des activités de pêche. Nous leur disons toujours d'attendre que les poissons se libèrent pour les pêcher, mais pas dans la zone. C'est un lieu aussi très convoité par des chercheurs qui y viennent souvent pour faire des recherches, mais l’effort de pêche y est interdit", confie le conservateur.
Selon lui, pour faire bénéficier les villages environnants des retombées de ce lieu, il a été créé des espaces d'exploitation. Pendant 10 jours, chaque année, une vingtaine de personnes y viennent pour l’exploitation. Les retombées sont partagées par tous les acteurs concernés, pour ne frustrer personne, à savoir les dames exploitantes, le comité de gestion et la mairie. Ils font des sensibilisations pour mieux protéger lesdites zones.
Il y a 13 villages qui sont polarisés par le Bolong de Bambo. ‘’On dissuade le maximum de personnes malintentionnées ou qui veulent y pêcher. Dernièrement, des recherches y ont été faites avec des partenaires sur les différentes espèces de poisson. Les conclusions sur les résultats que nous avons reçus sont satisfaisantes, même s’ils ne sont pas encore complets. Je voudrais vous dire aussi qu’il y a différents produits forestiers, des animaux de la faune terrestre. Les poissons viennent ici pour se cacher, car il y a la sécurité, mais une fois qu’ils pensent être en mesure de circuler, ils ressortent. L’essentiel est qu’ils ont des endroits pour se reproduire sans être dérangés. Une fois la maturité atteinte, ils peuvent aller ailleurs où les gens peuvent les pêcher, mais pas ici dans ce bolong. Nous ne nous lasserons jamais de sensibiliser pour demander aux pêcheurs de respecter la zone tampon. Mais puisque les ressources se font rares, on est toujours dans la communication et la sensibilisation’’, confie le commandant Lamine Kanté.
CHEIKH THIAM