Publié le 7 Jul 2020 - 03:37
CAMPAGNE AGRICOLE 2019-2020

Thiès en attente de son engrais

 

Dans la région de Thiès, plus précisément dans les Niayes, les producteurs agricoles soutiennent avoir reçu les semences de différentes variétés, mais ne sont pas encore en possession de l’engrais. Tout le contraire de leurs camarades qui s’investissent dans l’agriculture biologique-écologique. Ils n’ont rien reçu.
 
 
Avec sa zone côtière des Niayes à vocation maraîchère, fruitière et même vivrière de subsistance (mil, sorgho, maïs), la région de Thiès concentre, avec celle de la Casamance, la grande production du pays. Elle est également une zone où se développe une culture arachidière intense, arboricole et de manioc.
Dans le département de Tivaouane, les producteurs sont déjà dans les champs. Pour l’heure, ils ont fini de défricher les surfaces qui doivent être emblavées. La campagne agricole y a bien démarré. La distribution des semences se déroule ‘’très bien’’.
 
Les agriculteurs ont déjà reçu toutes les semences pour toutes les variétés. Le manioc et le riz sont subventionnés à 100 % par le gouvernement, précise le producteur de légumes, de maïs, papaye, mangue… Assane Ndiaye, dans le département de Tivaouane.
 
Cependant, on y attend l’engrais et la pluie pour entamer le repiquage. ‘’Pour cette année, l’État a fait de son mieux. Nous avons reçu les subventions à temps. On n’a pas connu de baisse de la subvention que nous donne chaque année le gouvernement du Sénégal. En ce qui concerne l’arachide, nous avons déjà reçu les semences écrémées et de l’arachide de base. Dans la zone des Niayes, plus précisément dans le département de Tivaouane, nous n’avons, pour le moment, aucune difficulté majeure liée à la non-disponibilité des semences. D’ailleurs, rien que dans la commune de Taïba Ndiaye, mes collègues producteurs ont déjà reçu 116 tonnes. Les producteurs ne se plaignent pas. Par contre, ce que nous n’avons pas encore reçu jusque-là, ce sont bien les engrais pour toutes les variétés’’, explique-t-il.
 
Ainsi, si jamais le ciel ouvre ses vannes les jours à venir, les agriculteurs de la région pourraient accuser un gros retard dans le repiquage du fait de l’engrais. C’est pourquoi le producteur-exportateur établi dans le département de Tivaouane invite l’État du Sénégal, notamment le ministre en charge de l’Agriculture et de l’Equipement rural, Moussa Baldé, à réagir au plus vite, sinon il risque de plonger ses camarades et lui dans une désillusion sans précédent.
 
‘’Nous sommes toujours en attente des engrais, alors qu’on doit se préparer à l’avance. L’année dernière, on a connu dans la région de Thiès un déficit pluviométrique qui nous a été fatal. Donc, l’État ne doit pas attendre qu’il pleuve d’abord pour nous apporter son appui en ce qui concerne les engrais. Si on nous donne l’engrais, on pourra le garder en attendant la pluie. Nous avons reçu les semences de mil, de haricot, d’arachide, de sorgho… Ce qui nous reste, c’est l’engrais. Il appartient au gouvernement de terminer en beauté ce qu’il a démarré. C’est tout ce que nous demandons’’, insiste M. Ndiaye, qui possède un champ de 30 hectares où il pratique l’arboriculture et l’horticulture.
 
La colère des agriculteurs bio
 
Par ailleurs, si les agriculteurs qui pratiquent l’agriculture conventionnelle ont bien été servis, la campagne est au point mort, chez les défenseurs de l’agriculture écologique-biologique. Joint par téléphone, le président de la Fédération nationale pour l’agriculture biologique (Fenab) se plaint et regrette que l’État ait décidé de continuer à soutenir une seule partie. Pour lui, la subvention du gouvernement doit profiter à tous. ‘’J’ai entendu parler de l’appui de l’État pour les semences. En tout cas, nous qui pratiquons une agriculture saine, n’avons pas reçu une quelconque subvention du gouvernement. L’État n’a toujours pas de manière officielle soutenu les agriculteurs qui font de l’agriculture écologique-biologique. Alors que nous sommes aussi des agriculteurs.
 
A l’heure où on évoque tous les jours la problématique du réchauffement climatique, de la fertilité des sols, de la nappe phréatique… je crois qu’il faut privilégier cette forme culturale pour mieux protéger l’environnement’’, fulmine Doudou Diop. Aussi, appelle-t-il l’État à changer de paradigme, en se tournant davantage vers l’agriculture écologique-biologique. Une agriculture qui, dit-il, met en avant la santé ‘’des hommes, de l’animal’’ et promeut un environnement sain, au grand bonheur de l’homme.
 
L’année dernière, dans la région de Thiès, toutes les variétés de céréale ont connu une baisse, sauf le sorgho (augmentation de 31 %) et le maïs (avec une hausse de 10 %). Les productions de céréales sont passées de 120 754 tonnes en 2017-2018 à 73 532 tonnes en 2018-2019. Une baisse des productions causée par le déficit pluviométrique. Du fait de la rareté des pluies dans cette zone, Assane Ndiaye supplie à l’État de les faire parvenir à temps, pour ne pas subir les affres de la saison écoulée. 
 

MBOUR - HIVERNAGE

Pas assez de semences, l’engrais indisponible

Le début de l’hivernage de cette année est très particulier. Marqué par la présence de la Covid-19, il s’annonce très difficile pour les cultivateurs du département de Mbour qui n’ont pas encore reçu des semences à suffisance, ni même de l’engrais pour démarrer leurs activités.

IDRISSA AMINATA NIANG

Même si la météo a annoncé un hivernage pluvieux cette année, les cultivateurs du département ne pensent pas, pour autant, faire une bonne récolte. Ils sont entre recherche de semences et attente d’engrais. Dans cette situation d’attente et d’incertitude, certains cultivateurs ont commencé a lancé un cri du cœur afin de réussir leur saison 2020. C’est le cas des agriculteurs de Ndiaganiao qui déplorent d’ores et déjà les conditions dans lesquelles ils se retrouvent, en cette veille d’hivernage.

‘’La préparation de l'hivernage est très difficile pour les cultivateurs, parce que, souvent, ce qu'il faut vraiment au cultivateur pour préparer la saison des pluies, nous ne l'avons pas. Nous n'avons eu aucun soutien. Nous ne disposons pas actuellement d’éléments essentiels à l'activité de l'agriculture. Les éléments les plus importants, pour nous cultivateurs, ce sont les semences et les engrais’’, déplore le président des chefs de village de la commune de Ndiaganiao, Ndiouma Ndiaye.  Encore que, précise-t-il, ‘’très souvent, ces intrants que nous recevons compliquent plus les choses qu’ils ne les facilitent, parce que, quand le promoteur vient, il arrive avec ses camions, mais ce qu'il nous livre ne peut même pas satisfaire la moitié de la population’’, déplore le chef du village de Kothiane. Il assure que beaucoup d’entre eux n’ont pas encore de semences, alors qu’ils n’attendaient que l’Etat.

Dépité, il trouve que les subventions faites par l'Etat sur les intrants agricoles n'ont aucune valeur, puisque cela ne permet pas aux agriculteurs de se procurer ce dont ils ont besoin pour cultiver leurs terres pourtant si fertiles. Pour cette année, indique-t-il, ‘’il y avait deux qualités de semences d'arachide, ici. L'une est vendue à 17 500 F les 50 kg. L'autre est cédée à 13 500 F pour la même quantité. Encore qu’on a du mal à en trouver en quantité suffisante. Les cultivateurs prennent d'assaut le stock qui s’épuise rapidement. Les autres sont obligés de prendre leur mal en patience’’, se lamente le président des chefs de village.

Selon Ndiouma Ndiaye, le deuxième problème auquel les agriculteurs de la commune sont confrontés, c'est celui des machines. ‘’Pour toute la commune, seules 10 machines y ont été acheminées. Dans des villages qui comptent entre 500 et 1 000 habitants, on leur demande de se partager une seule machine ou une houe. Finalement, pour régler le problème, on procède par tirage au sort. Celui qui gagne prend la machine’’, se désole-t-il.

Face à cette difficile situation des agriculteurs, Ndiouma Ndiaye ne veut pas entendre parler d’un soutien conséquent de l’Etat. ‘’A dire vrai, nous avons l'impression que le président a oublié les cultivateurs du département de Mbour, particulièrement ceux de Ndiaganiao’’, peste-t-il.

Au Service départemental de l’agriculture, Serigne Mansour Kane confirme que la situation n’est pas facile, et ce depuis fort longtemps. L’insuffisance des semences n’est pas une situation tout à fait nouvelle. Toutefois, il informe que pour certains produits, la mise en place a déjà démarré. Pour d’autres, pas encore et certains ont même déjà été vendus. Sur cette lancée, il a fait savoir que le département doit recevoir 661,4 tonnes d’arachide contre 631 l’année dernière. Actuellement, 598,4 tonnes ont été déjà vendues, soit 90,3 % du stock mis en place. Selon lui, il ne reste que la commune de Ngaparou qui doit recevoir 20 tonnes et la commune de Malicounda qui attend un reliquat, après avoir reçu 5 tonnes d’un promoteur qui a été changé. Pour les autres espèces, il est prévu 40 tonnes de maïs et 39 tonnes de sorgo, pour ne citer que celles-là.

En ce qui concerne Ndiaganiao, M. Kane renseigne que la commune a déjà reçu globalement 66 tonnes d’arachide. Toutefois, il est vrai que la dotation en engrais n’est pas encore mise en place, comme dans toutes les autres communes du département. Ainsi, explique-t-il, il y a deux variétés d’arachide disponibles. On peut avoir la variété 55 écrémée à 165 F CFA le kilogramme en coque ou 330 F CFA en graine. On peut également avoir la 55 R2 certifiée à 175 F CFA. Pour les autres produits, le maïs est à 200 F CFA le kilo, le niébé ordinaire à 175 F CFA le kilo et le niébé certifié à 200 F CFA le kilo.  Pour le mil, il s’agit d’un produit certifié dont le prix sera déterminé par les services compétents.

Pour ce qui est des engrais, les subventions varient de 50 à 55 %. Du coup, le 6.20.20 utilisé pour la culture de l’arachide sera vendu à 6 100 F CFA les 50 kg, soit une subvention de 55 %. Les 15.15.15, communément appelé ‘’triple 15’’, utilisé pour le maïs, sera disponible au prix de 8 425 F CFA le sac de 50 kg, avec 50 % de subvention. Pendant ce temps, le 15.10.10 destiné à la culture du mil, subventionné à 50 %, sera vendu à 7 300 F CFA les 50 kg, et enfin l’urée, qui est un passe-partout, sera vendu à 7 975 F CFA les 50 kg.                

 
  GAUSTIN DIATTA (THIÈS)

 

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