Publié le 24 May 2019 - 20:13
COUT DE L’ELECTRICITE AU SENEGAL

Pas de baisse envisageable, dans le contexte actuel

 

Au Sénégal, une baisse du coût de l’électricité ne peut pas être envisagée, dans le contexte actuel, selon le ministre de l’Energie et du Pétrole, Mouhamadou Makhtar Cissé. Il réceptionnait, hier, des turbines éoliennes de la centrale de Taïba Ndiaye, au Port autonome de Dakar.

 

Le Sénégal ne peut pas se permettre, selon le ministre de l’Energie et du Pétrole, d’être producteur de pétrole et de gaz, et de ne pas construire un écosystème qui devrait lui permettre, peut-être demain, de vendre de l’énergie dans la sous-région.

En effet, Mahamadou Mactar Cissé explique que le mix énergétique a permis, dans un premier temps, d’avoir 8 parcs solaires (Bokhol, Malicounda, Santhiou Mekhe, Ten Merina, Kahone et Sakal) pour 150 mégawatts (MW) et deux autres qui vont arriver. Avec le parc éolien de Taïba Ndiaye (Petn), c’est 300 MW d’énergie solaire sur le sol sénégalais qui viennent s’ajouter à l’existant, en plus des 9 % d’énergie hydroélectrique de Manantali.

Toutefois, le ministre de l’Energie souligne qu’une baisse du coût de l’électricité ‘’ne peut pas être envisagée’’, dans le contexte actuel. ‘’D’ailleurs, le parc ne sera opérationnel qu’à partir du mois de décembre prochain, pour les 50 premiers MW. C’est 200 milliards de francs Cfa d’investissements qu’il faudra rembourser. Ce n’est pas un don. Les investissements dans le secteur sont très lourds et jusqu’à présent, nous continuons de dépendre des importations de pétrole. Donc, nous ne maitrisons pas les cours’’, explique le nouveau ministre.

Mahamadou Mactar Cissé s’exprimait, hier, face à la presse, à l’occasion de la réception des turbines de la centrale éolienne de Taïba Ndiaye, une commune de la région de Thiès.

Le ministre de l’Energie signale qu’aujourd’hui, les cours du pétrole sont en train de monter. ‘’Ce qui est d’ailleurs assez inquiétant sur le prix de l’électricité ou du carburant, de façon générale. Jusqu’à présent, c’est l’Etat qui supporte les coûts et il y a des pertes commerciales très importantes pour la Société africaine de raffinage (Sar) et la Senelec. Il existe surtout un coût budgétaire énorme, en termes de subvention supportée par l’Etat, de l’ordre de 200 milliards de francs Cfa, depuis 2016. Ce qui a un impact sur le vécu des Sénégalais’’, renseigne l’ancien Dg de la Senelec. Qui fait remarquer que ces subventions de l’Etat permettent aux Sénégalais de souffler par rapport à certains prix, mais cela ‘’ne permet pas’’ à l’Etat d’investir dans d’autres secteurs sociaux pour lesquels les Sénégalais ont également des attentes.

‘’Il faut suivre la réalité des prix, en attendant que le Sénégal soit producteur de gaz, d’ici 2022, pour permettre de baisser les coûts de production et, dans l’année qui va suivre, certainement, les coûts de vente de l’électricité. C’est une chaine. Il faut arriver d’abord à maitriser les coûts de production, les diminuer et, seulement après, on peut enclencher avec une baisse’’, dit-il.

Pour le ministre de l’Energie, le défi majeur, aujourd’hui, reste la stabilité du système de fourniture de l’électricité. Que les Sénégalais aient déjà accès à une électricité de qualité et après le problème du coût pourra être adressé.

Plus de 450 000 MWh, par an, attendus avec la centrale de Taïba Ndiaye

Dès lors, il convient de noter que le parc éolien de Taïba Ndiaye devrait commencer à transmettre de l'énergie au réseau local, d'ici fin 2019. Il fournira plus de 450 000 MWh d’électricité par an. Cela représente une augmentation de 15 % de la capacité de production du Sénégal et la fourniture d’électricité à plus de deux millions de personnes.

A ce propos, Mouhamadou Makhtar Cissé appelle les responsables de l’entreprise qui doivent exécuter le projet, à savoir Lekela, à être rigoureux dans le reste des délais d’exécution des travaux. ‘’Il faudra permettre au président de la République, dans son discours de fin d’année, de l’engranger dans son bilan. Il ne faut pas qu’on passe l’année’’, dit-il.

Pour sa part, le directeur général de Lekela reconnait que l’approvisionnement en énergie fiable et économique a toujours été ‘’vital’’ pour la croissance économique d'un pays. ‘’De nos jours, le besoin d'énergie fiable se conforme, de plus en plus, à une obligation écologique et morale de préservation de l’environnement’’, soutient Massaer Cissé.

Avec une capacité installée de 158 MW, la centrale éolienne de Lekela représentera, d’après lui, à elle seule, plus de la moitié de l'énergie renouvelable dans le mix énergétique du Sénégal. ‘’Ce parc place le pays comme un dealer en matière d'énergie renouvelable. Il fournira une énergie propre et renouvelable pour améliorer la vie de millions de nos concitoyens'', affirme le Dg de Lekela. Car, pour lui, le parc éolien de Taïba Ndiaye est à la fois un projet national et local qui répond aux principes de Lekela de fournir au plus grand nombre une énergie ‘’durable, fiable et compétitive’’, dans le cadre de programmes ayant un impact à long terme sur les communautés.

Une fois construit, le parc éolien comprendra 46 turbines éoliennes Vestas pouvant conduire chacune 3,45 MW. Elles s'appuieront sur une tour en acier tubulaire de 117 m et auront une longueur de lame de 61,7 m. Ce qui donnera une grande surface balayée de 12 469 m2 et permettra aux éoliennes de maximiser la quantité d'énergie capturée par le vent. ‘’Les turbines qu’on fait au Sénégal sont les meilleures au monde. C’est une technologie innovante et pointue. (…) En plus de créer des centaines d’opportunités d'emplois durant les phases de construction, le Petn engagera un large programme socioéconomique dans la commune de Taïba Ndiaye. Ceci afin de développer des moyens de subsistance durables pour la communauté locale’’, souligne M. Cissé.

En dehors de ces programmes, des projets visant à améliorer l’agriculture locale, fournir des possibilités de formation professionnelle, rénover ou construire des infrastructures locales comptent parmi les principaux points dans la mise en œuvre du parc de Taïba Ndiaye. Qui va durer 20 ans et investira jusqu’à 20 millions de dollars, soit 11,731 milliards de francs Cfa, sur la durée de vie du parc éolien.

‘’On a mis en place un programme de formation avec le lycée technique de Thiès, pour le recrutement des jeunes. En ce moment, ils sont 40 à être formés en alternance entre le parc éolien et les cours théoriques au centre de formation. L’espoir, c’est de les recruter comme techniciens d’entretien, de développer un savoir-faire local pour entretenir les parcs éoliens’’, renseigne-t-il. Et un centre informatique est en cours de construction pour les élèves. En plus de la formation, un nouveau marché a été déjà construit pour offrir un environnement commercial sûr aux femmes.

300 000 t d’émissions de Co2 évitées

Par rapport aux impacts environnementaux du projet, l’actuel Dg de la Senelec juge qu’il va contribuer à la réduction de l’empreinte carbone du pays. ‘’Le parc éolien de Taïba Ndiaye, c’est 300 000 t d’émissions de gaz carbonique (Co2) évitées. Ce qui correspond à environ 1,5 million d’arbres plantés. D’ailleurs, il sera bientôt lancé, au niveau de la Senelec, une évaluation de notre empreinte carbone sur toutes nos activités. Afin d’anticiper sur la prise en charge responsable de nos impacts actuels sur le climat’’, renseigne Papa Mademba Bitèye.

En effet, selon lui, avec les baisses notées, ces dernières années, sur les coûts des équipements de base des centrales solaires, le développement futur du parc de production sera basé ‘’essentiellement’’ sur l’utilisation des ressources gazières et sur les énergies renouvelables.

Ce qui va permettre à la Senelec d’améliorer la sécurité d’approvisionnement de l’électricité, en limitant au maximum sa dépendance aux variations exogènes des cours des produits pétroliers. En ce sens, l’actuel patron de la Société nationale d’électricité rappelle que la stratégie de réserve d’exploitation et le programme ‘’Smart Grid’’ sont en cours de mise en œuvre. Ceci, pour rendre le système électrique ‘’plus résilient’’. Mais également ‘’plus intelligent’’ aux fins d’infléchir les modes de production et de consommation de manière à parvenir à un résultat optimal en matière d’efficacité et de sécurisation énergétique.

Power Africa contribue à plus de 140 milliards de francs Cfa

Il convient de souligner qu’à travers la Société américaine de promotion des investissements à l’étranger, plus connue sous le nom d’Opic, le gouvernement américain a fourni un financement direct et des garanties à ce projet. Une contribution financière évaluée à plus de 140 milliards de francs Cfa, selon l’ambassadeur des Etats-Unis au Sénégal. En plus, l’Agence américaine pour le développement international (Usaid) a bouclé le financement. ‘’Les efforts conjugués de ces deux agences s’inscrivent dans le cadre de l’initiative phare du gouvernement américain, Power Africa, visant à doubler l’accès à l’énergie en Afrique subsaharienne, d’ici 2030. Taïba Ndiaye n’est qu’un volet du partenariat entre les Etats-Unis et le Sénégal’’, témoigne Tulinabo S. Mushingi.

L’ambassadeur souligne que le nouveau Compact Mcc de 348 milliards de francs Cfa renforcera le réseau de transport et de distribution d’électricité au Sénégal. Et contribuera également à améliorer la gouvernance globale du secteur de l’énergie. Le compact aidera le pays à atteindre son objectif d’accès universel à l’électricité d’ici 2025.

MARIAMA DIEME

 

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