Publié le 16 Nov 2016 - 13:48
DEVELOPPEMENT DU CONTINENT

Les Etats africains invités ‘’à animer un front de solidarité’’ 

 

Des intellectuels africains ont appelé leurs pays à mettre en place un front de solidarité pour le développement du continent. C’était avant-hier, lors d’une table ronde organisée à Dakar sur le modèle de développement chinois. Ils estiment que l’Afrique peut s’inspirer du modèle chinois qui, préviennent-ils, n’est pas transposable.

 

La rencontre sur le modèle de développement chinois, organisée avant-hier dans les locaux du Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique (CODESRIA), a été un fort moment d’échanges. Une occasion pour les intervenants de faire le focus sur les bonds réalisés par ce pays. Le directeur du Forum du Tiers-Monde, qui a introduit le thème, a dressé un constat amer relatif aux Etats africains. ‘’Pour le moment, ils n’ont pas de projet. C’est ça le drame. Maintenant, ce  dont nous avons besoin, nous les peuples du Sud, c'est-à-dire Chine, Asie, Afrique et Amérique Latine, c’est d’animer un front de solidarité face à l’agression impérialiste contemporaine. Malheureusement, à l’heure actuelle, il n’existe à aucun niveau’’, se désole Samir Amin.

L’économiste estime que le modèle chinois de  développement n’est pas transposable sur le continent. Il invite les Etats africains à s’inspirer de l’expérience du pays de Mao Zedong. ‘’Nous avons à apprendre de ce pays qui a inauguré  des voies de développement différentes de celles de l’Union soviétique ou des autres pays. Sa révolution a donné la terre aux familles paysannes dans la légalité. En Afrique, nous sommes confrontés partout aux mêmes problèmes, c'est-à-dire les défis du capitalisme, de la Banque mondiale, du Fmi.

Ces institutions et les Occidentaux nous imposent leurs agendas’’, déplore-t-il. Avant de faire savoir qu’il n’y a pas de conditionnalité avec la Chine. Critique, Samir Amin lance ses vérités en ces termes : ‘’Nous ne savons pas ce que nous voulons. Nous devons travailler à avoir notre projet de développement. La Chine est prête à nous aider dans le domaine agricole. Aussi, nous avons intérêt à étudier son expérience de manière critique. Ceci pour avoir notre propre agenda africain.’’ Pour lui, si cette négociation avance, les Occidentaux vont reculer. Déjà, relève-t-il, ils sont dans cette voie. De l’avis de M. Amin, cette coopération avec la Chine s’inscrit dans cette dynamique de faire partir les anciennes colonisatrices. ‘’Il nous faut créer cette capacité d’obliger l’impérialisme à reculer’’, déclare le modérateur du débat.

Le docteur Demba Moussa Dembelé a, quant à lui, rappelé que les plans d’ajustement structurels ont détruit les avancées qui avaient été faites sur le continent, y compris au Sénégal considéré à cette époque comme un bon étudiant de ces institutions internationales. En 2011, rapporte le membre du Forum des alternatives, le conseil économique des Nations unies a indiqué que les neuf modèles de développement qui avaient été imposés aux Etats africains ont tous échoué. Fort de cela, il fait remarquer : ‘’Pour le développement de nos pays, nous ne devons pas écouter les sirènes venues d’ailleurs. Et je crois que l’une des leçons à tirer de l’expérience chinoise, c’est d’avoir, au niveau sous régional, un projet souverain sans lequel on ne peut pas aller très loin.’’

Dr Dembélé plaide aussi pour que les pays du continent travaillent pour assurer leur souveraineté dans le cadre de la gestion de leurs ressources naturelles. Hostile aux institutions qui se préoccupent des politiques internes du continent, M. Dembélé déplore : ‘’Nous avons vu la Banque mondiale avec son chiffon de Doing business venir nous dire comment faire notre budget. Le Sénégal est encore sous domination. Tant que cette influence persiste, vous n’irez pas loin avec ce Plan Sénégal émergent.’’ A ses yeux, il y a une ‘’ruée terrible’’ sur les terres du continent. Suffisant pour lui de prévenir sur les risques d'une ‘’nouvelle colonisation’’. L’analyste d’alerter : ‘’Tout le monde est interpellé. La coopération Sud-Sud est plus respectueuse que celle que nous avons connue avec les anciennes colonisatrices. Cette relation permet à l’Afrique de s’arracher de l’emprise des anciennes puissances dominatrices.’’

Progrès chinois

Le professeur Yang Guang de l’académie chinoise des sciences sociales a, pour sa part, insisté sur les réformes qui ont permis à son pays de faire des progrès. Il s’agit de la réforme agricole  enclenchée en 1969 avec, dit-il, le système de responsabilisation des domestiques. ‘’Les terres ont été distribuées aux familles paysannes pendant 40 ans. Depuis lors, on a constaté que les productions agricoles ont augmenté.’’ Le deuxième point a été axé sur la création d’emplois dans les zones reculées avec l’industrialisation de l’agriculture. ‘’Les gens n’ont plus besoin de quitter leurs terroirs. Aussi, il y a la création des zones économiques spéciales sur la côte pour attirer les investisseurs étrangers. Dans le domaine de la production, le gouvernement a beaucoup investi dans les infrastructures routières, dans les villages’’, renseigne-t-il. Selon lui, cette approche a contribué à renforcer l’augmentation de la production agricole dans les zones rurales. 

PAPE NOUHA SOUANE   

 

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