Publié le 26 Oct 2019 - 01:06
DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE DE L’AFRIQUE

Aminata Mbengue Ndiaye prône la participation aux grands débats de prise de décisions stratégiques 

 

Les pays africains ont besoin de participer aux grands débats de prise de décisions stratégiques qui peuvent influencer la marche de leurs économies. C’est ce qu’a souligné hier la ministre sénégalaise de la Pêche et de l’Economie maritime, Aminata Mbengue Ndiaye, lors de la cérémonie d’ouverture des Rencontres africaines qui se tiennent à Dakar.

 

Dakar accueille depuis hier la 4e édition des Rencontres africaines initiées par les partenaires européens de l’Afrique. L’objectif visé avec ces deux jours de rencontres entre hommes d’affaires africains et européens, c’est de nouer des partenariats gagnants-gagnants.  Selon la ministre sénégalaise de la Pêche et de l’Economie maritime, les pays africains ont besoin de participer aux grands débats de prise de décisions stratégiques qui peuvent influencer la marche de leurs économies. ‘’C’est tout le sens de l’initiative du Cosec, appuyée par la Chambre de commerce internationale et le gouvernement sénégalais.

Il ne s’agit plus ni moins que de susciter l’intérêt des Africains concernant les grandes questions du commerce mondial. L’Afrique a beaucoup souffert de sa difficile intégration dans le commerce mondial avec 43 pays membres sur les 162 que compte l’Omc. Leurs capacités à tirer grandement profit de ce commerce reste faible’’, indique Aminata Mbengue Ndiaye, lors de son allocution à l’occasion de la cérémonie d’ouverture.

Pour la ministre de la Pêche et de l’Economie maritime, il est dès lors ‘’important’’ de soutenir toute initiative qui pourrait ‘’atténuer cette marginalisation’’ de l’Afrique. ‘’Donc, le lancement des incoterms 2020 n’est pas l’aboutissement d’un processus, mais le début. Dans cette dynamique, les Conseils des chargeurs africains devront immédiatement s’atteler à assurer une large vulgarisation de ces règles au niveau de leurs Etats. Afin d’éclaircir et d’éclairer aussi bien les pouvoirs publics que les acteurs privés sur le contenu matériel de celles-ci et leur importance’’, plaide-t-elle. En effet, un incoterms est un terme normalisé qui sert à définir les droits et devoirs des acheteurs et vendeurs participant à des échanges internationaux et nationaux.

Pour sa part, le Secrétaire général de la Chambre de commerce internationale estime qu’un système commercial multilatéral ‘’fort, sans barrières protectionnistes’’, est de nature à assurer la prospérité et réduire les inégalités à travers le monde. ‘’La Chambre de commerce internationale est une force de propositions pour réformer et améliorer l’efficacité de l’Organisation mondiale du Commerce (Omc), notamment dans le domaine du régime des subventions, du transfert de technologie, de la sauvegarde de l’organe des différends - essentiel pour le fonctionnement de la chambre de l’Omc - le commerce en ligne qui est celui de l’avenir, la contribution des règles du commerce à la réalisation et à la mise en œuvre de l’accord de Paris sur le climat’’, soutient François Georges.

Mieux s’intégrer dans le commerce mondial

En réalité, dans la stratégie de la Chambre de commerce internationale, il signale que l’Afrique qui ne représente aujourd’hui que 3% du commerce international avec une population qui représente environ 20%, revêt d’une place ‘’toute particulière’’. D’après le Sg de cette chambre, l’ambition c’est d’augmenter leur présence sur  le continent, pour ‘’aider’’ le secteur privé africain à ‘’mieux s’intégrer’’ dans le commerce mondial. ‘’Les chaines de valeurs mondiales contribuent considérablement à la croissance, en permettant aux entreprises des pays en développement de gagner en productivité et en efficacité.

C’est ainsi que nous voudrions mobiliser les entrepreneurs africains plus dynamiques, particulièrement les plus jeunes, dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable, dans la levée des barrières du commerce et à l’investissement en Afrique. Ou encore leur participation aux forums mondiaux des Nations le B20-G20, de l’Organisation mondiale du commerce pour faire du business africain’’, affirme M. Georges.  A cet égard, il considère que l’adoption pour l’Union africaine de la Zone de libre-échange continentale (Zlec), constitue un ‘’immense espoir’’ pour améliorer les échanges commerciaux entre pays africains. Ces échanges ne représentent que 13% du commerce africain. Ce qu’il juge ‘’insuffisant’’. ‘’La Chambre de commerce internationale se tient prête à partager avec les Etats et le secteur privé, son expérience, expertise, en matière de multilatéralisme commercial, pour lever les obstacles à la réalisation de ce grand marché’’, fait-il savoir.

Pour une nouvelle forme de partenariat

Si le Sénégal veut avoir une croissance durable, plus d’emplois, le Commissaire général des Rencontres africaines, Marc Hoffmeister, pense que cela passera forcément par le développement des entreprises. ‘’Nous essayons de générer la croissance du Sénégal de  demain en essayant de faire nouer des partenariats inclusifs entre les entreprises européennes qui sont financièrement plus soutenues, et celles sénégalaises qui peuvent créer de la valeur ajoutée’’, dit-il. Sur ce, M. Hoffmeister informe qu’ils sont venus avec beaucoup de Petites et moyennes entreprises (Pme) et Petites et moyennes industries (Pmi). ‘’Quand les entreprises sénégalaises sont uniquement sous-traitantes, cela crée des problèmes. Ici, il y a beaucoup de Pme-Pmi européennes qui sont de la taille des entreprises sénégalaises.

Une entreprise française qui a 40 employés aura du mal à s’implanter au Sénégal sans l’appui du privé national. Donc, ce qu’elle vient chercher, c’est un partenaire. Là, c’est quelque chose qui doit être construite. D’où l’organisation de cette rencontre’’, précise-t-il.  Avant d’ajouter qu’il ne faut pas avoir des relations ‘’sous-traitants-fournisseurs’’. ‘’Cela c’est les relations à papa qu’on avait il y a 20 ans. Maintenant, c’est fini. Ce que cherchent les gens, c’est de s’implanter durablement. Il faut un avantage concurrentiel. Il faut que les structures se développent en s’implantant ici. Pour ce faire, il leur faut un partenaire sénégalais. Il y a un fort changement de mentalité dans les entreprises françaises’’, soutient le Commissaire général des Rencontres africaines.

A ce propos, le nouveau ambassadeur français au Sénégal, Philippe Lalliot, révèle que la diplomatie économique c’est l’une de ses missions prioritaires. Et elle ne résume pas d’ailleurs, à ‘’aider les entreprises françaises à gagner des marchés, remporter des contrats’’. C’est aussi ‘’construire en commun de nouveaux modèles économiques sous le nom de partenariats et de faire émerger une solution africaine sur ce marché du Sénégal. Il s’agit d’abord de nouer des partenariats avec les entreprises locales’’, renchérit-il. Il y a quelques initiatives d’ouverture au marché sénégalais qui ont été mises en place, telles que le Frenchtech de Dakar, le réseau ‘’villes durables’’, qui était lancé en juin dernier. Pour le successeur de Christophe Bigot, c’est cette volonté de ‘’proximité’’ qui explique la réorientation de leur action à l’endroit des Pme africaines. ‘’Il s’agit de faire de nos attentes commerciaux notre marque de fabrique. Celle qui nous distingue de beaucoup de concurrents, c’est celle d’être là aux côtés des entreprises sénégalaises, des Sénégalais dans la durée. C’est notre volonté de nous insérer dans les communautés au plus près du terrain. Par rapport à la formation, le secteur privé y investit beaucoup et la France est prête à investir davantage.  Tout cela, c’est en faveur d’une croissance durable et exclusive’’, ajoute M. Lalliot.

Selon le ministre sénégalais de la Santé, Abdoulaye Diouf Sarr, le Sénégal ouvre ainsi la porte de l’Afrique aux entreprises européennes et françaises. Ceci, pour leur permettre d’aller saisir de nouvelles opportunités dans le marché continental. ‘’En noyant des relations économiques avec le Sénégal, vous serez en contact avec le reste du continent’’, assure-t-il. 

L’ambassadeur français salue les performances économiques du Sénégal

‘’Je suis très impressionné par la vitalité de l’économie sénégalaise. Cinq années de croissance consécutive de plus 6%, en France, on en rêverait. Ce n’est pas assez fréquent même sur le continent et ça mérite d’être souligné. Les autorités sénégalaises doivent en être félicitées. Ces chiffres parlent d’eux-mêmes’’, s’est réjoui hier l’ambassadeur français au Sénégal pour une première prise de parole en public depuis son arrivée il y a un mois.

Selon Philippe Lalliot, les tendances ont été confirmées tout récemment par le Fmi, avec une croissance à deux chiffres à 10,11 et 12% à partir de 2022 et 2023. ‘’Ceci résultat du fort constat de l’accélération des investissements publics, du soutien important des bailleurs résulte surtout d’une vraie vision politique du Président Macky Sall. Au-delà de la croissance, c’est tous les indicateurs macro-économiques du pays qui sont au vert ou presque. C’est un pouvoir d’achat plus important, des flux d’investissements étrangers qui ont doublé en 6 ans. Un autre signe de l’attractivité croissante de ce pays est l’inclusion financière qui progresse comme le montre la hausse du taux de bancarisation de près de 20%’’, poursuit le diplomate français.

M. Lalliot estime que la deuxième phase du Pse s’inscrit dans la ‘’continuité’’, en donnant une place ‘’plus importante’’ aux investissements privés. ‘’Continuité, constance, cohérence, sont les marques de fabrique traduisant cette vision politique. La recette fonctionne manifestement. Il existe d’importants gisements de croissance et d’emplois ici, dans les infrastructures, l’agriculture, les télécom’, le numérique et avec les perspectives des hydrocarbures.

L’environnement stable du pays est une chance pour le Sénégal pour accélérer l’émergence’’, renchérit-il. Pour l’ambassadeur, l’attractivité du Sénégal est ‘’indéniable’’ aux entreprises françaises notamment. ‘’Elles ont été là dans les bonnes périodes et les moins bonnes. La France s’est ainsi toujours tenue fermement du côté du Sénégal et continuera à l’accompagner sur le chemin de l’émergence. Elle continuera à encourager le secteur privé à saisir toutes opportunités qui se présenteront en apportant une vraie valeur ajoutée en termes de développement local’’, conclut l’actuel chef de la diplomatie française à Dakar.

MARIAMA DIEME

 

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