Alors qu’ils étaient condamnés aux travaux forcés à la perpétuité par la Cour d’assises de Matam en 2012, Abdoulaye Thioune et Issa Sy ont été sauvés hier de la prison à vie par une nullité de la procédure.

Le 30 mai 2012, Abdoulaye Thioune et Issa Sy voyaient leur vie basculer car ils étaient condamnés aux travaux forcés à la perpétuité par la Cour d’assises de Matam. Mais hier, ils ont été sauvés de la prison à vie par la Chambre criminelle d’appel de Dakar. Les juges d’appel ont en effet suivi les avocats de la défense en déclarant la procédure nulle. En fait, dès l’entame du procès, les conseils des accusés ont soulevé une exception de nullité en demandant à la Cour d’annuler les poursuites car lors de l’audition au fond, leurs clients ont été entendus sans la présence de leurs avocats. L’avocat général avait demandé aux juges de rejeter la requête. Il a expliqué que le juge d’instruction était dans l’urgence et que le problème de l’éloignement de Matam posait un problème. Les juges avaient préféré joindre l’exception au fond et ordonné les débats d’audience.

Il résulte des débats qu’Abdoulaye Thioune et Issa Sy avaient été condamnés pour association de malfaiteurs, vol en réunion commis la nuit avec violence et usage d’arme. Ils sont accusés d’avoir braqué entre Waoundé et Okidiéri deux charretiers qui revenaient d’un marché hebdomadaire, dans la nuit du 28 au 29 octobre 2007. D’après les victimes, les accusés, armés de couteau et de coupe-coupe, les ont dépouillées de la somme globale de 322 000 F CFA. Informée, la gendarmerie de Waoundé avait fait une descente sur les lieux.

A leur arrivée, les pandores n’ont trouvé qu’Abdoulaye Thioune, ligoté par les populations qui l’avaient lynché. D’ailleurs, à la barre, l’accusé a renseigné qu’il s’était même évanoui. Issa Sy qui avait pris la tangente n’avait été appréhendé qu’en février 2010 sur dénonciation de Thioune. Mais depuis l’instruction, Issa a toujours nié sa participation au braquage. Hier, à la barre de la Cour d’appel, il a réitéré ses dénégations. Même Thioune qui avait fait des aveux à l’instruction et lors du procès d’instance a contesté les faits. Il a déclaré que les populations l’avaient arrêté et battu car elles l’avaient pris pour un indicateur de la Douane.

Il a tenté de disculper son co-accusé en soutenant l’avoir dénoncé à cause de la torture. Cette variation fait que l’avocat général trouve ‘’maladroite’’ la ligne de défense de Thioune. ‘’Il a fait des aveux à l’instruction puis en première instance, il a changé de version aujourd’hui à cause de la perpétuité’’, a déclaré le maître des poursuites. Toutefois, il estime que les faits ne relèvent pas d’une grande criminalité et méritent d’être disqualifiés en vol avec violence. Pour la répression, il a requis 10 ans de travaux forcés contre Thioune. En revanche, il a demandé l’acquittement d’Issa Sy, arguant qu’il n’y a aucun élément qui permet de le condamner.

La défense a également plaidé l’infirmation du premier jugement. Pour Me Ndièguène, avocat de Thioune, aucun franc n’a été retrouvé sur son client alors que les victimes soutiennent avoir été dépouillées de 322 000 F CFA. ‘’Mon client s’est retrouvé au mauvais endroit et au mauvais moment et il n’y a pas de preuve de vol mais de simples allégations’’, a laissé entendre Me Ndiéguène qui, à défaut d’un acquittement, a sollicité la bienveillance. Il a aussi pris la défense d’Issa Sy en soutenant que c’est une victime et non un complice.

‘’Les accusés ont été pris pour des criminels alors que ce n’est pas la réalité car il n’y a pas mort d’homme mais un blessé avec une incapacité temporaire de travail de 10 jours’’, a renchéri le conseil de Issa. Il a ajouté qu’il y a une absence de certitude dans la déclaration des victimes. Car, la robe noire ne comprend pas que l’une des victimes ait pu identifier les accusés lors de la confrontation survenue 2 ans et 3 mois après des faits qui se sont déroulés à 21 heures. Fort de ces arguments, Me Wade a plaidé l’acquittement.

Dans son verdict, la Cour a renvoyé Abdoulaye Thioune et Issa Sy sur la base de la nullité. Par conséquent, elle a ordonné la mainlevée du mandat de dépôt.

FATOU SY