Publié le 27 Sep 2017 - 23:57
MOHAMED DIOP (PRESIDENT DE LA FSNS)

‘’Le niveau africain est déjà assez élevé pour nous’’

 

Le président de la Fédération sénégalaise de natation et de sauvetage (FSNS), Mohamed Diop, se dit satisfait du déroulement de la trentième édition de la Traversée Dakar-Gorée. Face à l’absence de médailles aux Jeux olympiques des nageurs sénégalais, Dr Diop avoue que cela est encore au-dessus des ambitions de la natation sénégalaise, dans la mesure où le Sénégal est déjà en retard sur l’échiquier africain.

 

Pouvez-vous nous faire le bilan de la trentième édition de la Traversée Dakar-Gorée ?

 La participation a été une grande satisfaction parcequ’on a eu 687 inscrits. C’est une bonne chose puisque le plus grand nombre était  de 700 participants. Je pense que c’est très bien. L’autre aspect, c’est le nombre de délégations. On a eu quatre délégations présentes. Elles sont venues du Gabon, de la Gambie, du Cap-Vert et de la France. Ça aussi, c’est pour nous quelque chose d’important. On ne compte pas dans cet effectif les individuels qui viennent d’autres horizons. Il y a eu aussi la participation de l’Association « Les Reflet de l’Eau ». Cette association française, en partenariat avec la FSNS, a organisé une Traversée à Ngor, la veille de Dakar-Gorée, samedi matin. Cette traversée est très importante parce qu’elle fait la promotion de la natation chez les femmes, les enfants et la natation en famille. Et nous pensons que c’est fondamental pour pousser les gens à venir vers notre sport. On est satisfait aussi au niveau sportif parce qu’on a eu deux nouveaux vainqueurs aussi bien chez les hommes que chez les femmes. Ça prouve que la natation sénégalaise bouge. 

 Un fait marquant est l’hommage qu’on a rendu à Chams Ghazi qui nous a quittés à quelques jours de la présente édition. Nous avons rappelé ce qu’il a eu à faire en prenant part pendant longtemps à cette prestigieuse compétition. Pour nous, l’édition de 2017 était l’occasion de montrer que la natation peut se faire jusqu’à un âge avancé, à travers les performances de Chams Ghazi. Il fallait donc penser à lui. Elle a aussi permis de rendre hommage à  Karim Thioune, membre d’honneur de la Fédération sénégalaise de natation, directeur technique national.

Amadou Ndiaye, natif de France, a remporté la Traversée Dakar-Gorée de 2017 devant le champion sortant, Adama Thiaw Ndir. Comment analysez-vous cette performance réalisée par ce jeune de 16 ans?

La natation, c’est le sport où les jeunes réussissent souvent. Je rappelle que Zeina Saheli avait remporté la traversée Dakar-Gorée à l’âge de 13 ans si je ne me trompe. On a vu des jeunes gagner des trophées à 14 ou 15 ans chez les filles. C’est vrai que c’est très difficile de voir ça chez les garçons. Mais Amadou Ndiaye l’a réussi. C’est un bon nageur d’endurance. C’est lui qui nous a représentés aux Championnats du monde de Budapest (Hongrie, Ndlr). Nous avions déjà vu ses qualités depuis l’année dernière. Il avait participé aux Championnats d’Afrique  des jeunes au Caire (Egypte, Ndlr) où il a terminé à la cinquième place. La performance de Amadou  Ndiaye surprend le grand public mais pour nous, ce n’est pas une surprise vu le temps qu’il a fait durant la saison.

Quels sont les problèmes auxquels la Fédération sénégalaise de natation est confrontée ?  

Ils sont nombreux. Mais nous commençons par les choses les plus basiques, c’est-à-dire les infrastructures. Elles sont insuffisantes et insuffisamment réparties sur l’étendue du territoire national. C’est des choses qu’il faut changer. La natation constitue, au-delà de l’aspect sportif, une utilité publique parce qu’elle permet d’apprendre à nager et de sauver des vies en évitant les cas de noyade. C’est également un sport recommandé par le corps médical pour beaucoup de thérapies. Donc, quand on voit tous ces facteurs qui transcendent le volet sportif, on retient que la natation doit être intégrée dans les programmes scolaires, démocratisée et popularisée.

Les jeunes abandonnent très tôt la natation au profit du basket ou du football. Qu’est-ce que la fédération compte faire pour les maintenir ?

C’est une réalité. Ce qu’il faut maintenant, c’est essayer de trouver une motivation pour maintenir les jeunes le plus longtemps possible dans la discipline. Les motivations ne sont pas forcément financières. Nous continuons à chercher. La natation est l’une des rares disciplines où beaucoup de  pratiquants peuvent s’insérer. Ils intègrent le corps des maîtres-nageurs ou de surveillants de baignade après avoir effectué une carrière de nageur.

Cela constitue un plus qui devrait permettre de maintenir les gens. Maison on voit très souvent des anciens nageurs qui ne s’occupent plus de la discipline. Ils ne l’aident pas non plus alors qu’ils ont eu un travail par le biais de ce sport. Les solutions, on ne les trouve pas assez vite. On va continuer à se battre et à conscientiser les gens pour qu’ils rendent ce qu’ils ont reçu. Si nous arrivons à les convaincre, nous aurons des nageurs qui resteront le plus longtemps. Ils pourront travailler  dans l’encadrement après leur retraite.

La FSNS est-elle parvenue à respecter son calendrier cette saison, notamment en ce qui concerne les compétitions ?

Nous avons un programme qui s’étend entre les mois de mars et décembre.  Nous organisons des compétitions dans toutes les catégories. Contrairement aux autres disciplines, nous avons des championnats de poussins, minimes, benjamins, cadets, juniors et séniors. Même dans la traversée Dakar-Gorée,  nous avons les Masters pour les vétérans. On va continuer notre saison jusqu’à la fin du mois de novembre. On est allé à l’intérieur du pays : Cap-Skirring, Saint-Louis, Sokone, Fatick et Kaolack.

Comment se porte la natation dans les autres régions?

A Thiès, on peut dire que la discipline se porte bien. Mais dans les autres villes comme Saint-Louis et Kaolack, il y a une baisse. On est en train de relancer les activités en Casamance et à Fatick. A Tamba, on a voulu relacer mais ça ne suit pas trop. La fédération ne peut pas être partout. Le développement de la natation dans les autres régions nécessite l’engagement des acteurs des Ligues régionales, mais ils n’ont pas beaucoup de moyens et de ressources humaines pour développer la discipline comme on le souhaite. Ça demande un investissement et un sacrifice très important. 

L’insertion de la Traversée Dakar-Gorée dans le calendrier de la Fina tarde à se faire. Qu’est-ce qui explique ce retard ? 

L’intégration de la traversée dans le circuit de la Fédération internationale de natation demande beaucoup de moyens. Il y a aussi un cahier de charges très difficile à remplir. La fédération, à elle seule, ne pourra  jamais le couvrir pour organiser la compétition sans l’aide des autorités  étatiques. Aujourd’hui, ce qui est le plus important pour nous, c’est de continuer à attirer les gens et faire de cette compétition un facteur de développement économique et touristique. Il est plus intéressant de faire venir le grand public de l’étranger que de réunir trois ou cinq vedettes qui coûteront cher et qui ne donneront pas plus de spectacle à la compétition.

Qu’est-ce que la Fédération doit faire pour que les nageurs sénégalais puissent remporter une médaille olympique ?

Cela  va faire bientôt 30 ans que le Sénégal n’a pas eu une médaille olympique. Donc l’absence de médaille ne concerne pas uniquement la natation. Notre objectif aujourd’hui n’est pas d’avoir une médaille olympique même si on a un nageur qui était à une place de la demi-finale. Nous ne sommes pas à ce niveau ni à ces ambitions-là. Le niveau africain est déjà assez élevé pour nous. Nous n’allons pas nous fixer des ambitions démesurées. Ce qu’on a réussi à faire depuis un certains temps, c’est de se qualifier aux Jeux olympiques depuis 2000. Si on peut se maintenir à ce niveau, ce serait très bien.  

OUMAR BAYO BA

Section: