Publié le 15 Sep 2025 - 22:58
TERRORISME - PRESSION SÉCURITAIRE DU JNIM SUR KAYES

Les conséquences directes sur le Sénégal 

 

La pression sécuritaire du Jama’at Nusrat al-Islam wal-Muslimin (JNIM) sur Kayes ne va pas épargner ses pays voisins dont le Sénégal, à cause de la porosité de la frontière et de l’interdépendance économique entre les deux pays, selon l’Observatoire de Timbuktu Institute.  

 

L’intensification des activités du Jama’at Nusrat al-Islam wal-Muslimin (JNIM) dans la région de Kayes pourrait avoir des répercussions directes sur les pays voisins comme le Sénégal. Timbuktu Institute pointe du doigt la porosité de la frontière et l’interdépendance économique entre les deux pays. L’Observatoire de Timbuktu Institute redoute une pression plus accentuée sur Nioro et ses implications pour la Mauritanie, la perturbation du commerce transfrontalier, le risque de déstabilisation sécuritaire, une pression sur les ressources sécuritaires sénégalaises et le risque de contagion régionale.  

Dans le cadre de sa stratégie d’asphyxie de Bamako, le JNIM, souligne l’institut, n’hésite plus à mettre la pression sur Nioro, rompant ainsi avec l’idée d’inviolabilité de cette ville dont la spécificité est d’abriter l’influent Chérif Bouyé Haïdara. Le groupe terroriste semble aussi profiter des « divisions » au sein du leadership militaire du régime malien et de l’agitation notée, ces derniers temps, au niveau des casernes.  

Pour certains témoins, Nioro ou certaines localités environnantes seraient déjà sous une forte pression, bien que les autorités rejettent la thèse d’un blocus. La Mauritanie, subissant aussi l’afflux des réfugiés dans les régions frontalières du Mali, semble voir son espace public agité par des réactions de plus en plus fortes du côté des communautés maures.  

Possible perturbation du commerce transfrontalier avec le Sénégal

Une telle situation ne serait pas sans risque d’entraîner, progressivement, des officiels dans une crise latente avec le JNIM. En fait, le Chérif de Nioro, renseigne la même source, jouit encore d’une grande respectabilité en Mauritanie, y compris dans les sphères des hautes autorités civiles, militaires et de hauts cadres de l’administration. De plus, il ne faudrait pas négliger cette influence du Chérif de Nioro que le JNIM semble, désormais, compter parmi ses cibles, notamment dans les régions des Hodhs et de l’Assaba en Mauritanie.  

Suite aux menaces envers le guide religieux et sur sa sécurité, renseigne le document, il y a eu même une mobilisation d’internautes appelant l’État à « intervenir militairement pour le protéger ». Cela voudrait dire que si la pression sécuritaire dans la région de Kayes se poursuivait, les implications d’une telle situation dépasseraient les frontières de cette région du Mali et toucheraient les pays voisins au regard de la transnationalité des appartenances et de la complexité des allégeances tant communautaires que religieuses.  

Selon Timbuktu Institute, il est fort probable qu’il y ait une perturbation du commerce transfrontalier avec le Sénégal, qui est une voie d’exportation majeure pour le Mali, notamment via le port de Dakar. La perturbation des routes commerciales à Kayes, comme le blocus imposé par le JNIM, menace les exportations maliennes (or, bétail, bois) qui transitent par le Sénégal. Cela pourrait entraîner une hausse des coûts de transport et des prix de certains biens essentiels au Sénégal, où les réseaux commerciaux formels sont affectés par la dépendance croissante envers des routes informelles contrôlées par le JNIM.  

En effet, le JNIM cherche à infiltrer les zones frontalières, y compris l’Est du Sénégal, comme en témoignent les incidents sécuritaires de plus en plus fréquents à proximité de sa frontière, comme à Melgué et tout récemment à Diboli. ‘’La porosité de la frontière, combinée à des vulnérabilités comme la faible sensibilisation sécuritaire et la propagation du salafisme, expose à un risque d’attaques ou d’établissement de bases arrière par le JNIM’’, prévient Timbuktu Institute.  

Déploiement du Groupe d’action rapide de surveillance et d’intervention (GARSI) à Goudiri

Les attaques du 1er juillet 2025 dans la région de Kayes, proches de la frontière, ont ravivé les inquiétudes sécuritaires au Sénégal. En réponse à la menace, le Sénégal a renforcé sa sécurité frontalière, notamment via le déploiement du Groupe d’action rapide de surveillance et d’intervention (GARSI) à Goudiri, soutenu par l’Union européenne.  

Cependant, l’escalade des activités du JNIM pourrait exiger une mobilisation accrue de ressources, détournant l’attention des priorités internes comme les défis socio-économiques. De plus, certaines insuffisances en matière d’intelligence sociale dans les approches jusqu’ici prônées posent des questions sur les stratégies adéquates, qui devraient intégrer davantage d’initiatives préventives politiquement mieux assumées.  

Concernant les risques accrus de contagion régionale, selon le document, la perturbation du commerce et la montée de l’insécurité à Kayes pourraient favoriser la corruption, les trafics illicites – y compris de produits à double usage – et les réseaux de contrebande, affectant progressivement la stabilité régionale.

Le Sénégal, en tant que partenaire économique clé du Mali, risque de voir des réseaux criminels transfrontaliers se renforcer avec la possibilité de toucher différents secteurs, comme c’est déjà le cas pour celui des transports. Cette dimension économique dans la stratégie du JNIM, accentuant les vulnérabilités déjà préoccupantes, risque de compliquer davantage la lutte contre le terrorisme et la gestion des urgences sécuritaires.

« Le Jama’at Nusrat al-Islam wal-Muslimin (JNIM) déploie une stratégie sophistiquée combinant blocus économiques, attaques ciblées sur les infrastructures stratégiques et coercition pour asphyxier l’économie malienne et isoler progressivement la capitale, Bamako. En ciblant la région de Kayes, un carrefour économique vital représentant environ 80 % de la production aurifère malienne et un nœud clé du corridor commercial Bamako-Dakar, le JNIM cherche à perturber les flux commerciaux essentiels qui assurent une part non négligeable des importations terrestres du Mali. Cette stratégie, illustrée par les attaques coordonnées du 1er juillet 2025 sur Kayes et Diboli, le sabotage de la Route Nationale 1 (RN1) le 31 août 2025, et l’instauration d’un blocus sur les principaux axes menant à Kayes et Nioro-du-Sahel, vise à priver Bamako de ressources vitales, pouvant provoquer une insécurité alimentaire accrue et une hausse des prix des biens de première nécessité’’, renseigne le document.  

De même, ‘’en imposant des restrictions sur les importations de carburant et en ciblant des entreprises de transport, le JNIM cherche à établir un contrôle économique parallèle, renforçant son emprise financière par l’extorsion et les taxes, même sur les réseaux informels », confie la même source.  

Amplification des divisions communautaires et facilitation du recrutement local  

En outre, note Timbuktu Institute, le JNIM exploite les fragilités sociales et économiques de Kayes, notamment les conflits structurels liés à l’esclavage par ascendance et les tensions entre agriculteurs et éleveurs, pour amplifier les divisions communautaires et faciliter le recrutement local, bien que celui-ci reste limité par la résilience économique liée à la migration.  

Les attaques contre des intérêts économiques étrangers, comme les sites miniers à Bafoulabé et l’enlèvement d’étrangers travaillant pour des compagnies internationales, visent à décourager les investissements étrangers, notamment chinois, affaiblissant ainsi les finances de l’État.  

En ciblant des symboles de l’autorité étatique et en imposant des règles strictes dans des zones comme Farabougou, le JNIM cherche à éroder la légitimité de l’État, pouvant se positionner, éventuellement, dans le cadre d’une gouvernance alternative, tout en évitant les erreurs tactiques d’autres groupes terroristes, comme une occupation prolongée sans soutien local.  

Pour le Sénégal, les conséquences de cette stratégie sont multiples : la perturbation du commerce transfrontalier via le port de Dakar menace les exportations maliennes (or, bétail, bois), augmentant les coûts de transport et des biens essentiels. La porosité des frontières accroît le risque d’infiltration du JNIM dans l’Est du Sénégal, comme en témoignent les incidents à Diboli et Melgué, tandis que la pression sur Nioro-du-Sahel, cité influente pour la Mauritanie en raison de la figure du Chérif Bouyé Haïdara, pourrait envenimer les relations communautaires transfrontalières.  

Ces dynamiques risquent de favoriser les trafics illicites et une contagion régionale avec un continuum d’insécurité, mettant, éventuellement, sous pression les capacités sécuritaires du Sénégal.  

Sans une coopération régionale renforcée entre le Mali, le Sénégal et la Mauritanie, axée sur le partage de renseignement, la sécurisation des corridors économiques et l’intégration d’approches préventives tenant compte des dynamiques sociales locales, la région risque une escalade de la violence favorisant une certaine instabilité, prévient l’institut.

Une réponse efficace, indique Timbuktu, nécessiterait le renforcement des mécanismes endogènes de médiation à Kayes, comme ceux portés par les chefs de village et les familles neutres, pour apaiser les tensions communautaires et contrer l’exploitation des fractures sociales et des griefs socio-religieux et économiques par le JNIM.

En l’absence de telles mesures, dit-on, l’insécurité croissante et la fragilisation économique pourraient non seulement isoler Bamako, mais aussi menacer la stabilité de l’ensemble de la sous-région ouest-africaine.  

Les autres actes du JNIM avec les autres pays  

Par ailleurs, le rapport fait état des autres pratiques du JNIM, parmi lesquelles figurent entre autres les attaques contre les intérêts économiques étrangers, la déstabilisation progressive en misant sur la fragilisation de l’économie – entre blocus annoncés et contrôle des flux économiques. Il y a aussi le « jihad » économique et le ciblage des axes logistiques vitaux.  

Toutefois, renseigne l’institut, pour l’heure, le recrutement local dans la région de Kayes semble plus difficile en comparaison avec d’autres régions. En effet, souligne-t-on, ‘’il y a une certaine résilience économique due aux retombées économiques de la migration, mais Kayes fait face à des défis croissants sur le plan sécuritaire, notamment en raison de sa position transfrontalière. La porosité des frontières avec le Sénégal et la Mauritanie – constituant un continuum socioculturel déterminant –, mais aussi la circulation d’armes et l’influence de dynamiques conflictuelles régionales, exacerbent les velléités communautaires’’, .  

CHEIKH THIAM  

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