Publié le 3 Nov 2025 - 17:00
PUBLICATION RAPPORTS ARCOP 2022-2023

Principaux enseignements

 

Les rapports 2022 et 2023 ont été publiés le week-end. Malgré un léger recul, les entreprises sénégalaises et communautaires continuent de se tailler plus de 50 % de parts de marché. Les Chinoises et les Françaises sont presque à égalité. Ci-après quelques enseignements tirés du rapport le plus récent.

 

L’Autorité de régulation de la commande publique (Arcop) a publié le week-end les rapports 2022 et 2023. Au titre de la gestion 2023, soixante-dix-huit autorités contractantes ont été sélectionnées pour être auditées.

« Le nombre de structures effectivement auditées est de soixante-dix-sept (77) », indique le rapport, qui précise : « Le FONSIS s’est opposé à l’audit de ses marchés, estimant que le Code des marchés publics ne lui était pas applicable. »

Selon le document, les 78 autorités contractantes ont passé 8 084 marchés pour une valeur estimée à 2 813 milliards de F CFA, sur un total de 2 864 milliards (montant total des marchés immatriculés hors secret/défense et combustible SAR/SENELEC).

« Les contrôles et vérifications effectués ont porté sur un échantillon représentatif de 3 976 marchés d’une valeur totale estimée à 2 729 milliards de F CFA ; soit un taux de couverture de 49 % en nombre et 97 % en valeur », informe le gendarme des marchés.

L’analyse de la répartition des marchés en fonction du mode de financement montre une contribution quasi équitable entre les ressources nationales et les fonds extérieurs. « Sur un montant total de 2 864 milliards de F CFA, les financements extérieurs représentent 1 439 milliards de F CFA, soit 50,24 % du total, contre 1 425 milliards de F CFA mobilisés par l’État du Sénégal, soit 49,76 % », souligne le document.

Les nationaux premiers sur les marchés, les Chinois en deuxième position devant les Français
Le rapport 2023 conforte par ailleurs une part importante des entreprises communautaires, en particulier sénégalaises, dans la commande publique. La répartition des entreprises attributaires selon leur nationalité montre que 50 % des marchés reviennent aux entreprises sénégalaises ; 9 % aux entreprises maliennes pour 259 milliards.

Chez les entreprises hors UEMOA, la part de marchés est évaluée à 41 %. Les Chinoises sont toujours en tête avec environ 371 milliards de F CFA, soit 12,95 % du total. Viennent ensuite les entreprises françaises avec 365 milliards de F CFA, soit 12,74 % ; les Espagnoles avec 222 milliards, soit 7,75 %.

Globalement, on note un niveau assez bas de marchés passés par entente directe. En 2023, le taux des marchés conclus par entente directe représente 3 % du nombre total des marchés immatriculés. Mais en valeur, cela représente environ 40 % des marchés, ce qui en fait un point d’attention pour l’organe de régulation.

Le FONSIS, 5ᵉ gros acheteur, a refusé d’être contrôlé par l’Arcop
En 2023, les cinq principaux acheteurs publics ont concentré près de 55 % de la valeur totale des marchés immatriculés, traduisant leur poids déterminant dans la commande publique. Il s’agit principalement de l’Agence des Travaux et de Gestion des Routes du Sénégal (AGEROUTE) ; du Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation ; de l’Agence de promotion des grands travaux de l’État (APIX) ; de l’Agence nationale pour les énergies renouvelables (ANER) et enfin du Fonds souverain d’investissement stratégique (FONSIS).

L’AGEROUTE se distingue comme le plus grand acheteur public, avec un montant total de 704 465 683 186 F CFA, ce qui représente 25 % du total des marchés immatriculés. « Cette prééminence est en grande partie due à ses engagements significatifs dans les projets d’infrastructures routières, en particulier dans le cadre de la construction de l’autoroute Dakar - Tivaouane - Saint-Louis. Ce projet d’envergure, réparti en plusieurs sections, représente un investissement total de 300 836 200 418 F CFA », informe le rapport 2023.

Pour le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, arrivé en deuxième position avec 272 315 905 141 F CFA, soit 10 % du montant total, il a mené plusieurs projets d’envergure en matière de construction et d’équipement des établissements universitaires à travers le Sénégal.

Infrastructures routières et ferroviaires, universités et instituts, transition énergétique… : ces priorités de l’État
On peut citer parmi les grands projets : la construction des nouvelles universités de Matam et de Tambacounda, avec des investissements respectifs de 111,3 milliards et 107,3 milliards F CFA, confiés aux sociétés DENTAL-BTP S.A. et Royal BTP.

Dans le même sillage, on note des initiatives comme la construction et l’équipement de l’Institut supérieur d’enseignement professionnel (ISEP) de Matam d’un montant de 16,31 milliards F CFA et les classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) de Thiès, réalisées par le Groupement IMMO LAND - COMPUTER LAND pour un montant de 12,88 milliards F CFA ; le projet de construction d’un amphithéâtre en préfabriqué à l’Université Cheikh Anta DIOP de Dakar, d’un montant de 1,53 milliard F CFA, ainsi que la fourniture d’équipements techniques pour les universités publiques, financées à hauteur de 17 milliards F CFA.

En ce qui concerne l’Agence de Promotion des Investissements et des grands travaux (APIX SA), arrivée en troisième position avec une valeur des marchés passés pour 237 569 489 694 F CFA, représentant 8 % du total, elle est surtout engagée dans les infrastructures comme le prolongement du Train express régional sur l’Aéroport international Blaise Diagne de Diass. « Dans la continuité du développement ferroviaire, APIX gère également la réalisation des infrastructures ferroviaires entre Diamniadio et la gare AIBD. Ce contrat, d’un montant de 108,41 milliards F CFA attribué à un consortium incluant EIFFAGE, YAPI MERKEZI et CSE, s’inscrit dans la vision d’une modernisation complète des infrastructures de transport. Ce projet est crucial pour étendre les lignes ferroviaires en respectant les normes internationales », renseigne le document, entre autres grands projets.

S’agissant de l’Agence nationale pour les énergies renouvelables (ANER), elle est à la quatrième place avec 225 349 238 887 F CFA, soit 7,9 % du volume total. À noter que ce montant est presque exclusivement alloué à des projets d’éclairage public utilisant des technologies d’énergie renouvelable, notamment les lampadaires solaires, qui témoignent d’un engagement fort pour une transition énergétique plus verte et plus durable, note l’Arcop.

Le rapport mentionne que l’un des projets majeurs de l’ANER est la fourniture, l’installation, la maintenance pendant dix ans, et la supervision à distance de 100 000 lampadaires solaires standards à travers le pays. Ce projet, d’un montant de 134,48 milliards F CFA, est attribué à Salvi Lighting Barcelona. Un autre contrat important, selon le rapport, porte sur la fourniture, l’installation, et la maintenance pendant six ans de 15 000 lampadaires solaires standards, attribué à Sunna Design SA pour un montant de 17,56 milliards F CFA.

Quant au Fonds souverain d’investissements stratégiques (FONSIS S.A.), il se classe cinquième avec 132 501 191 000 F CFA, soit 5 % du montant total. Cette somme est entièrement consacrée à la construction d’infrastructures hospitalières modernes et essentielles pour améliorer l’accès à des soins de qualité dans le pays.

Parmi les projets phares, souligne le rapport, il y a le contrat d’ingénierie, de reconstruction et de fourniture clé en main de l’hôpital Aristide Le Dantec, d’un montant de 86,5 milliards F CFA ; le contrat d’ingénierie, de construction et de fourniture clé en main d’un hôpital à Tivaouane, d’une valeur de 46 milliards F CFA, confié à ELLIPSE PROJECTS SAS.

L’Arcop a relevé par ailleurs le refus de cette dernière structure à se soumettre au contrôle en violation de la législation, sous le prétexte de la loi n° 2012-34 du 31 décembre 2012 autorisant la création d’un Fonds souverain d’investissements stratégiques (FONSIS). Des arguments similaires sont aussi généralement invoqués par la Caisse des dépôts et consignations, mais à la différence du FONSIS, celle-ci n’a pas refusé de se soumettre au contrôle.

« Les manuels de procédures auxquels font référence l’article 20 de la loi n° 2012-34 du 31 décembre 2012 et l’article 34 de la loi n° 2017-32 du 15 juillet 2017, qui soustraient respectivement le FONSIS et la CDC du champ d’application du Code des marchés publics sont contraires aux dispositions respectives de l’article 25 nouveau de la loi n° 65-51 du 19 juillet 1965 portant Code des obligations de l’administration, modifiée. »

Laquelle dispose « qu’aucune réglementation ou procédure particulière à un acheteur public, à une catégorie d’acheteurs ou à une catégorie de fournitures, services ou travaux ne peut déroger aux règles fixées par le Code des marchés publics ou prises en application de ce Code », rappelle l’organe de régulation qui invoque également la violation de l’article 4 de la directive communautaire n° 04/2005/CM/UEMOA du 9 décembre 2005 portant procédures de passation, d’exécution et de règlement des marchés et délégations de services publics dans l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA)

30 % des entreprises contrôlées présentent des performances peu satisfaisantes
Le rapport a aussi établi un classement des autorités contractantes selon leurs performances. Les statistiques montrent que 11 autorités contractantes sur 76 (hors CDC et FONSIS) ont enregistré des performances satisfaisantes, c’est-à-dire respectent bien les critères et procédures établis pour la gestion des marchés.

Sur les 76, 9 présentent des performances assez satisfaisantes, c’est-à-dire qu’elles répondent aux exigences avec quelques domaines nécessitant des améliorations ; 33 autorités contractantes enregistrent des performances moyennement satisfaisantes, c’est-à-dire montrent des signes de conformité, mais leurs pratiques pourraient être améliorées pour atteindre un niveau plus élevé de performance.

23 autorités contrôlées ont cependant enregistré des performances peu satisfaisantes, c’est-à-dire ont des lacunes significatives dans la gestion de leurs marchés. « Ces lacunes peuvent inclure des violations graves des procédures de passation des marchés ou des problèmes dans la documentation et l’attribution des marchés », indique le rapport.

En ce qui concerne les cinq entreprises les plus performantes, on note : l’Agence de développement municipal, l’AGETIP ; l’AGEROUTE, APIX SA et le CETUD. Le ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement, le ministère de la Santé et de l’Action sociale, l’Office des lacs et cours d’eau (OLAC) et la Ville de Dakar font partie des derniers de la classe. Il convient de rappeler que les auditeurs ne sont pas en mesure de se prononcer pour ce qui concerne le FONSIS et la CDC.

Par Mor Amar

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