Sonko met le cap sur 2024

Après la double page électorale (Locales et Législatives), place au scrutin présidentiel qui se tient dans 18 mois. L'opposant Ousmane Sonko, principal adversaire du régime en place, assure qu’il va mobiliser toute son énergie pour la Présidentielle à venir. Hier, le candidat déclaré s’est présenté comme un favori. Il en a profité pour tirer sur la France.
« Moi, Ousmane Sonko, je suis candidat à la présidentielle de 2024 ». Hier, c'est un Président de Pastef déterminé dans ses propos qui a fait face à la presse. Après avoir déclaré sa candidature, il a tenu à préciser que c’est le parti qui décide. ‘’Si un membre du parti veut également se présenter, il est libre de le faire. A ce moment, on organisera une primaire ».
Après les élections locales et législatives, le leader du Pastef ne veut pas marquer un temps de répit. Il se lance déjà pour la Présidentielle de février 2024. Pour lui, d'ici là, il faudra mettre le paquet. ''Nous allons maintenant nous tourner résolument vers l'avenir. C'est-à-dire les 18 mois qui nous séparent de l'élection présidentielle. Il faut admettre qu'ils ne seront pas de tout repos. Ils seront extrêmement chargés''. Dans cette perspective, Ousmane Sonko annonce une tournée nationale en décembre dans tous les 46 départements.
L’opposant veut ainsi se donner toutes les chances de réussir son pari. Confiant, le leader de la coalition Yewwi Askan Wi ne cache pas son optimisme. Il pense être un des grands favoris de ces échéances à venir. ''Personne n'est mieux placé que nous pour gagner la prochaine élection présidentielle de février 2024, s'il plaît à Dieu''. Mais cela n'est possible qu'avec l'engagement de tous, ajoute-t-il.
En perspective de ce ‘’rendez-vous historique’’, le leader de l’opposition invite les sénégalais à s’engager pour une vraie alternance en 2024. Ce qui lui fait dire : ‘’Si on rate encore le coche, les 50 prochaines années seront très difficiles. C’est pour cette raison que nous appelons les militants, sympathisants et l’ensemble des Sénégalais à s’engager pour un changement radical’’.
Aux militants, sympathisants et tous ceux qui sont épris de justice, de démocratie, de changement qualitatif et fondamental, il demande de se retrouver autour de l'essentiel. ''Il faut se mettre à la hauteur des enjeux, laisser de côté les débats stériles et puérils et faire focus sur notre projet'', poursuit-il.
Pour étendre son électorat, celui qui est arrivé en troisième position, lors de la Présidentielle de 2019, pense au renforcement et à la massification du parti. Ainsi, il a demandé à consacrer toutes les énergies à aller sur le terrain, à enrôler les jeunes pour qu'ils aillent s'inscrire sur les listes électorales. Mais aussi ''à implanter le parti dans tout le pays, dans ses moindres coins et recoins, les villages…''.
15 propositions de loi et une vingtaine de commissions d’enquête parlementaire
Face à la presse, le leader de Pastef a aussi abordé la question de la prochaine législature. A l’en croire les députés fraichement élus auront du pain sur la planche. Car, il annonce pas moins 15 propositions de loi et une vingtaine de commissions d’enquête parlementaire qui seront déposées sur la de l’Assemblée nationale, dès son installation. En effet, informe le leader de l’opposition, "j'ai beaucoup travaillé à élaborer des projets de lois dans tous les domaines qui seront déposés sur la table de l’Assemblée nationale, dès son installation. Nous avons également identifié un certain nombre de scandales sur lesquels il faudra impérativement exiger la mise en place de commissions d’enquête parlementaire’’. D’ailleurs, annonce-t-il, une séance de formations est prévue pour les députés de l’intercoalition Yewwi-Wallu.
Revenant sur les derniers scrutins, il déclare la victoire de l’opposition. ‘’Nous sortons d’une série d’élections qui ont consacré plus qu’une percée de l’opposition mais une nette victoire de l’opposition. Malgré les fraudes, les bourrages d’urnes et les manœuvres de l’administration en charge des élections et du conseil constitutionnel pour éliminer des listes, il est unanimement reconnu que l’opposition a nettement et largement gagné ces deux élections’’, dit-il.
D’ailleurs, le Patriote en chef refuse à BBY une quelconque majorité, même avec le soutien de Pape Diop qui lui donne 83 députés. Il martèle : « Dans cette Assemblée, il est inélégant pour Benno de parler de majorité. Personne n’a la majorité et même avec 10 sièges d’écart, il n’y a toujours pas de majorité ». Ce faisant, il a tenu à mettre chaque député de l’opposition devant ses responsabilités. ‘’Chaque opposant a brigué les suffrages des Sénégalais qui lui ont fait confiance. Toute décision que tout opposant prend ne nous engage point. Mais, nous respectons néanmoins leurs décisions. Cela ne doit pas faire beaucoup de bruit’’.
''En face de nous, une adversité et une inimitié jamais égalées''
Considéré par beaucoup comme le chef de l'opposition, Ousmane Sonko est conscient des défis à relever et surtout ce qui l'attend sur son chemin. Selon ses dires, on assistera, dans les semaines et les mois à venir, à une adversité et une inimitié sans précédent. C'est pourquoi il rappelle, à l'attention des militants : ''Nous sommes à cette étape fatidique d'un projet panafricain, souverainiste, que nous assumons sans complexe.''
Pour lui, le projet qu'il porte est même spirituel. ''En tant que croyants, musulmans, chrétiens… nous sommes convaincus que c'est une adoration d'œuvrer pour notre pays. Nous croyons que se mettre au service de sa société, se faire emprisonner, se faire tuer pour sa société est un acte d'adoration'', dit-il. Avant de demander à ses partisans à ne pas lâcher. Il déclare à ce propos : "C'est durant ce temps qui nous sépare de la prochaine Présidentielle que nous pourrons montrer aux Sénégalais que nous sommes capables de porter le projet que nous leur présentons.''
Une leçon pour la France
Le candidat à l'élection présidentielle n'a pas raté la France, durant son discours. Il persiste que le régime en place est de connivence avec la France pour lui mettre les bâtons dans les roues. ''Le régime de Macky Sall et la France ont décidé de freiner notre projet. On l'a vu avec la prolifération d'articles mensongers de leurs médias à mon encontre''. Le maire de Ziguinchor poursuit : ''Tous les jours, leurs laboratoires tournent à plein régime, fabriquent des complots et des projets de complot contre ma personne. Leur objectif est de trouver un motif de condamnation pour empêcher la candidature de Ousmane Sonko".
Il accuse le Chef de l’Etat de susciter des dossiers "de terrorisme, de rébellion, de viol imaginaire fabriqués avec le soutien de la France".
Selon lui, la France doit arrêter d'exploiter ses anciennes colonies. ''La France doit avoir la dignité de l'Allemagne qui ne repose sur aucune colonie et pourtant elle est la première puissance économique d'Europe. Elle doit avoir la dignité de la Norvège, du Danemark…'' Dans la même veine, l'ancien député demande à la France de ''lever son coude de l'Afrique et d'arrêter de sucer son sang''.
Cependant, l'opposant souligne ne pas être un antagoniste. D'ailleurs, il dit discuter avec des Français, comme cela a été le cas à la veille des Législatives. Sauf que, pour lui, il faut beaucoup tenir à la souveraineté nationale.
Ainsi, en réponse à ceux qui lui reprochent d'avoir des liens avec la Russie, Ousmane Sonko affirme qu'il n'est lié à aucune puissance étrangère, même s'il n'est pas contre le fait de discuter avec tout le monde.
Clin d’œil à Assimi Goita
L’autre sujet abordé, hier, a été le Mali. L'opposant n'a pas manqué de rassurer les frères maliens. Après avoir félicité et soutenu les décisions ''responsables et courageuses du pays d'Assimi Goita’’, il a déclaré : "J'encourage le président Assimi Goïta, parce qu'il n'a pas perdu la face. Ce sont ceux qui voulaient l'humilier qui sont obligés aujourd'hui d'aller à Bamako manger du fonio. Il n'a pas à rougir !" Ainsi, il lui demande de rester proche de son peuple, parce que dit-il, "en politique il n'y a que cette règle. Il faut faire de la politique pour son peuple et qu'il ne se détache jamais de cet objectif, qu'il reste collé aux intérêts de son peuple. Ils gagneront cette guerre par la grâce de Dieu, par les efforts des Maliens et par les efforts des Africains."
Dans la foulée, l’opposant ne s’est pas empêché de s’en prendre au Chef de l’Etat qui a entériné le retour des soldats Sénégalais, dans le cadre de rotation des forces de la MINUSMA. "Nous avons vu, dit-il, que Macky Sall a rapatrié les soldats Sénégalais qui étaient là-bas, puisqu'ils n'étaient pas là-bas en tant que Sénégalais, mais parce que la France avait demandé l'envoi de troupes."
Ainsi, si la situation perdure jusqu'en 2024, Ousmane Sonko promet, s'il est élu président de la République, d'envoyer des troupes au Mali et "d'en finir avec cette gangrène. Qu'ils tiennent bon et qu'ils restent dans la dignité qu'on leur connaît. La dignité qui a été professée dans la charte du Mandé".
EL HADJI FODÉ SARR