Publié le 13 Jan 2016 - 01:20
ESPAGNE

Entre le nouveau président catalan et Madrid, chronique d’un choc annoncé

 

Après trois mois de blocage et de négociations tendues, le Parlement catalan a voté, dimanche 10 janvier, l’investiture du nouveau président de la région, le maire de Gérone, le nationaliste Carles Puigdemont. Le « processus (indépendantiste) est sauvé », a déclaré le président sortant, Artur Mas, qui a été contraint de se « mettre de côté » pour permettre enfin la constitution d’un exécutif régional, paralysée depuis les élections du 27 septembre 2015, et éviter ainsi la tenue d’un nouveau scrutin.

 

Les indépendantistes à l’offensive

Dans les prochains jours, les indépendantistes, qui disposent de la majorité absolue des sièges au Parlement catalan (avec 47,8 % des voix lors du scrutin régional de septembre), vont commencer à appliquer leur feuille de route, exposée dans la résolution approuvée le 9 novembre. Celle-ci proclame « le début de la création de la République catalane » et affirme que le Parlement régional n’est plus soumis aux lois espagnoles. D’ici à 2017, les indépendantistes espèrent, d’après leurs plans, soumettre à référendum la Constitution de la nouvelle République catalane qu’ils se sont engagés à rédiger en dix-huit mois.

Annulée par le Tribunal constitutionnel le 2 décembre, cette résolution ne peut cependant pas être appliquée sans provoquer la réaction de Madrid, où le président du gouvernement, le conservateur Mariano Rajoy, a évoqué sa « fermeté et [sa] détermination » à défendre l’unité du pays et à utiliser « tous les mécanismes de l’Etat de droit » pour cela. Dès lors, les tensions devraient augmenter au fil des mois. D’ores et déjà, les conséquences du défi indépendantiste devraient se faire ressentir dans la configuration du prochain gouvernement espagnol.

 Rajoy et la droite en rempart contre la sécession

Le calendrier est délicat, dans la mesure où la session inaugurale du nouveau Parlement espagnol est prévue pour le 13 janvier, à Madrid. A l’issue des élections législatives du 20 décembre 2015, la chambre des députés est plus fragmentée que jamais. Pour former un gouvernement de coalition  (une grande première dans l’histoire du royaume), les partis doivent conclure des pactes. Or les positions de chacun sur la Catalogne risquent de compliquer les négociations.

Le Parti populaire (PP, droite au pouvoir), qui n’a pas une majorité suffisante pour gouverner seul, espère que la résurgence du défi indépendantiste convaincra le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE, gauche) de former une « grande coalition » avec lui et le parti centriste et antinationaliste Ciudadanos. Mariano Rajoy dirigerait alors cette « grande coalition », chargée de défendre l’unité de l’Espagne.

La gauche partagée sur le sort de la Catalogne

Le chef de file du PSOE, Pedro Sanchez, a cependant tenu à préciser, lundi, qu’il ne renoncerait pas à chercher à former un gouvernement alternatif car, selon lui, un nouveau gouvernement Rajoy « aggraverait encore plus la confrontation ».

Le PSOE propose une réforme de la Constitution vers un Etat fédéral et un nouveau statut d’autonomie de la Catalogne afin de renouer les liens avec les Catalans. Mais il refuse le référendum sur l’indépendance que défend le parti anti-austérité Podemos. Ce dernier souhaite laisser les Catalans décider de leur propre sort, même s’il n’est pas favorable à l’indépendance. Cette divergence de point de vue sur la Catalogne constitue la principale pierre d’achoppement sur laquelle buttent le PSOE et Podemos pour engager des négociations visant à sceller un pacte de gauche, sur le modèle portugais, dont l’objectif serait de pousser M. Rajoy à quitter le pouvoir.

Une bataille institutionnelle en vue

Le Parlement catalan s’est engagé à adopter « dans un délai maximal de trente jours », c’est-à-dire avant le 10 février, les lois qui lui permettront de se doter d’une Constitution, d’une Sécurité sociale et d’un Trésor public propres. Il doit aussi poser les bases d’une banque centrale catalane. Madrid devrait chercher à bloquer ces initiatives. Grâce à la réforme du Tribunal constitutionnel votée en 2015, les élus peuvent être suspendus de leurs fonctions en cas de rébellion. En dernier recours, le gouvernement espagnol pourrait demander la suspension de l’autonomie catalane et prendre le contrôle des institutions régionales. Dans ce cas, les indépendantistes catalans essaieraient d’impliquer la communauté internationale pour résoudre le « conflit » et obtenir la tenue d’un véritable référendum sur l’indépendance.

(lemonde.fr)

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