Publié le 2 Feb 2023 - 20:55
SETER-SENTER

Un contrat opaque

 

Malgré les nombreuses réponses servies en réaction au journal ‘’Le Figaro’’, le gouvernement reste silencieux sur les détails du contrat, notamment en ce qui concerne le respect des règles de marché public, gages de transparence.

 

Que cachent donc la Senter et son contractant dans le nouveau contrat d’exploitation du Train express régional ? Malgré les multiples sorties au vitriol, les tentatives de déminage répétitives, ni la Senter,  encore moins la Seter ne veulent s’épancher sur certains détails du contrat, notamment le montant de la rémunération des prestations de la filiale de la SNCF. Interpellé sur cette question par le journal ‘’Bés Bi’’, le directeur général de la société de patrimoine, Abdou Ndéné Sall, répond de manière très évasive : ‘’On attend que le contrat soit sorti pour rendre public tout cela…’’ A la question de savoir où ils en sont dans la finalisation du nouveau contrat, il disait : ‘’On a déjà signé et il reste des procédures de validation par les autorités de régulation des marchés publics.’’

‘’EnQuête’’ a essayé, hier, de joindre M. Sall pour en savoir plus sur la conformité de ce marché à milliards avec le Code des marchés publics. Malgré nos multiples relances, le directeur général et ses services n’ont pas voulu apporter des éclairages. Aucune réaction. Au niveau de la Direction centrale des marchés publics (DCMP) chargée du contrôle a priori des marchés, l’accès à l’information s’avère un véritable casse-tête. Après moult tentatives, une dame finit par répondre. Dès l’évocation du nom TER, elle se braque : ‘’C’est impossible de parler du dossier. Nous, nous avons en charge le contrôle a priori ; on ne saurait en parler.’’ Pourrions-nous au moins savoir à qui nous avons l’honneur ? Elle répond gentiment, mais fermement : ‘’Je suis désolée !’’

Un véritable pied de nez à la transparence et au droit à l’information du public sénégalais.

Une chose est sûre. En tant que marché public, le contrat avec la Seter est assujetti aux dispositions du Code des marchés publics. Ce spécialiste explique : ‘’Je n’ai pas vu le contrat pour le qualifier. Mais ce que je puis vous assurer, c’est que soit c’est un marché public, soit c’est une délégation de service public. Dans les deux cas, il est soumis au Code des marchés publics.’’

Si tel est le cas, pourquoi l’autorité contractante, en l’occurrence la Senter, n’a pas procédé à un appel d’offres pour y pourvoir ? Quelle a été la voie empruntée pour attribuer ce marché à la filiale de la SNCF, dans la plus grande discrétion ? Autant de questions qui restent en suspens, faute d’accessibilité des autorités compétentes.

La semaine dernière, ‘’Le Figaro’’ informait qu’il restait à l’accord trouvé entre le président de la République et les représentants de la SNCF le ‘’blanc-seing de la Commission des marchés publics jalouse de ses compétences’’. S’agissait-il d’une autorisation ou de simples formalités administratives ? Les autorités n’ont pas encore jugé opportun d’en parler. A la place, c’est surtout la ‘’Fake-news’’ sur la propriété ou non du TER qui méritait, selon eux, des réponses.

Dans tous les cas, relève le spécialiste, si le contrat a été conclu par entente directe (gré à gré), il doit être autorisé par la Direction centrale des marchés publics. ‘’L’autorité contractante doit saisir la DCMP, qui fait un contrôle de légalité. Celle-ci va voir si les conditions fixées par l’article 76 du Code des marchés publics ont été respectées. Si oui, elle autorise, sinon, elle peut refuser. En cas de refus, l’autorité contractante peut saisir l’ARMP, qui va voir si les motifs avancés par la DCMP sont fondés ou pas’’.

Pour le cas d’espèce, le dossier n’est pas allé au niveau de l’ARMP, selon nos vérifications. Aussi, peut-on supposer que la DCMP, même si elle n’a pas voulu répondre aux sollicitations, a accordé une dérogation. Au cas contraire, ce serait une violation grave des dispositions relatives au Code des marchés publics.

Mais dans quelles conditions le gré à gré est admis ? Aux termes de l’article 76 du Code des marchés publics (le code de 2014 qui était encore en vigueur), la dérogation peut être accordée dans les conditions suivantes. D’abord, ‘’pour les marchés destinés à répondre à des besoins qui, pour des raisons tenant à la détention d'un droit d'exclusivité, ne peuvent être satisfaits que par un cocontractant déterminé.

Ensuite, pour des fournitures, services ou travaux qui complètent ceux ayant fait l'objet d'un premier marché exécuté par le même titulaire, à la condition que le marché initial ait été passé selon la procédure d'appel d'offres et que le marché complémentaire ne porte que sur des fournitures, services ou travaux qui ne figurent pas dans le marché initial conclu, mais qui sont devenus nécessaires à la suite d'une circonstance imprévue et extérieure aux parties, et que ces fournitures, services ou travaux ne peuvent être techniquement ou économiquement séparés du marché principal.’’ Entre autres conditions. 

MOR AMAR

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