Des spécialistes demandent à l’État de surseoir à sa promulgation

Des spécialistes invitent l’État du Sénégal à surseoir à la promulgation de la nouvelle loi sur la biosécurité qui a été votée le 3 juin dernier, pour différentes raisons, selon eux.
Le 3 juin dernier, à l’unanimité, sans débat et en procédure d’urgence, les députés de l’Assemblée nationale du Sénégal ont adopté la nouvelle loi sur la biosécurité. Elle vient abroger la loi n°2009-27 du 8 juillet 2009 qui assurait une protection de la diversité biologique, et en particulier son article 18 interdisant d’importer ou de mettre sur le marché des organismes génétiquement modifiés (OGM).
Plus d’un mois après, des spécialistes qui ne sont pas favorables à cette loi ont publié un communiqué pour annoncer qu’ils sont consternés, inquiets et indignés par cette nouvelle loi. Ils expliquent leur courroux par le fait qu’au niveau international, de nombreuses recherches et expérimentations ont fini de renseigner sur les risques sanitaires, économiques et environnementaux que représentent les OGM. Comme l’illustre, tout près du Sénégal, l’exemple du coton BT au Burkina Faso qui a fait perdre aux paysans cotonculteurs et à ce pays respectivement leur principale source de revenus et d’importantes devises d’exportation.
De plus, poursuit la même source, ces dernières années, les technologies utilisées pour modifier le génome ont montré des incertitudes quant à leurs effets à court et à long terme sur les individus et la biodiversité. ‘’Et pourtant, depuis 2015, nous interpellons le ministère de l’Agriculture (Maer) et l’Agence nationale de biosécurité (ANB) pour que le gouvernement du Sénégal organise un débat national sur la question, en particulier avec les agriculteurs et les consommateurs qui sont concernés au premier plan, comme l’a suggéré l’Académie nationale des sciences et techniques du Sénégal (ANSTS) partagé lors de la Séance académique solennelle du 28 février 2017.
Vu le soutien de l’État à la transition agro-écologique, nous avions compris que les interpellations auprès du Maer et de l’ANB avaient eu un écho favorable. Notre compréhension a été renforcée par la note de service n°01734 Maer/DA (2021) mettant en place le comité technique national de suivi du Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (Tirpaa)’’, ont soutenu les signataires dans la note.
Ainsi, face aux risques que représentent les OGM sur la diversité biologique et la santé humaine et animale, face au risque de faire perdre au Sénégal sa place de pays référence de l’agroécologie, renseigne le document, l’État du Sénégal devrait ‘’surseoir’’ à la promulgation de la loi sur la biosécurité, en attendant qu’un débat populaire avec l'ensemble des acteurs ne soit réalisé autour de ce texte juridique, conformément aux exigences de l’article 13 de la Convention sur la biodiversité et de l’article 23 du Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques.
‘’Depuis les années 80, et en défense de la vie et de la démocratie, divers groupes d'intérêt du Sénégal promeuvent les droits des exploitations agricoles familiales et de leurs systèmes semenciers et ont exprimé et continuent d'exprimer des préoccupations liées à l'utilisation et à la gouvernance des biotechnologies. Il s'agit des paysans, des pasteurs, des pêcheurs, des associations consuméristes, de collectivités territoriales, d'environnementalistes, de scientifiques et autres ONG spécialisées. Tous sont des détenteurs légitimes de droits dans le pays, dont l'Assemblée nationale est censée être un mécanisme représentatif’’, a indiqué le communiqué.
CHEIKH THIAM