Publié le 10 May 2020 - 00:28
EFFETS DE LA COVID-19

Le FMI souligne la nécessité de réformer à nouveau les entreprises publiques 

 

Des entreprises publiques ‘’bien régies et en bonne santé financière’’ peuvent ‘’s’avérer très utiles’’ pendant les périodes de crise comme la pandémie actuelle de Covid-19 et promouvoir des objectifs de développement. Pour ce faire, le Fonds monétaire international (FMI) soutient que de nouvelles réformes seront nécessaires. L’institution l’a relevé dans un communiqué publié hier.

 

La pandémie de Covid-19 a mis en valeur, d’après le Fonds monétaire international (FMI), le rôle du secteur public dans la protection des vies et des moyens d’existence. Un effort auquel participent les entreprises publiques, à savoir celles de services publics qui assurent les services essentiels, ou encore les banques publiques qui avancent des fonds aux petites entreprises.

‘’Certaines de ces entreprises éprouvent cependant des difficultés et pèsent sur les budgets publics. C’est notamment le cas des sociétés pétrolières publiques ébranlées par l’effondrement des cours pétroliers et des transporteurs aériens nationaux abandonnés par leurs passagers’’, souligne l’institution dans un communiqué rendu public hier.

À une époque où les États doivent répondre à des besoins croissants tout en composant avec une dette élevée, le FMI pense que le principe fondamental des entreprises publiques devrait être ‘’d’éviter le gaspillage’’ de ressources publiques. ‘’Les enjeux sont élevés. Des entreprises publiques bien régies et en bonne santé financière peuvent s’avérer très utiles pendant les périodes de crise comme la pandémie actuelle et promouvoir des objectifs de développement.

Toutefois, avant d’en arriver-là, de nouvelles réformes seront nécessaires. À défaut, les coûts pour la société et l’économie pourraient être considérables’’, affirme les économistes du FMI dans le document.

Ainsi, à l’intention des pays ‘’soucieux d’améliorer’’ les résultats de leurs entreprises publiques, l’institution de Bretton Woods recommande une ‘’réévaluation périodique’’ de la pertinence des entreprises publiques. Ceci pour s’assurer que les contribuables en obtiennent pour leur argent. ‘’L’Allemagne, notamment, procède à des examens biennaux. La raison d’être des entreprises publiques dans les secteurs concurrentiels, comme le secteur manufacturier, est douteuse, car les entreprises privées sont en général plus efficientes lorsqu’il est question de fournir de produits et de services’’, renseignent-ils. D’après ces spécialistes, les pays doivent ‘’encourager’’ les gestionnaires à accroître leur rendement et inciter les organismes compétents à ‘’bien surveiller’’ les entreprises publiques. ‘’La transparence totale de ces dernières est essentielle au renforcement de leur responsabilisation et à la réduction de la corruption. L’intégration de ces entreprises dans les objectifs relatifs au solde budgétaire et à la dette, encouragerait davantage la discipline budgétaire. Certains pays comme la Nouvelle-Zélande ont déjà mis en place plusieurs éléments de ces pratiques’’, lit-on dans le communiqué.

Pour l’institution, il urge également que les Etats dotent les entreprises publiques de moyens financiers ‘’suffisants’’ pour s’acquitter de leur mandat économique et social, comme en Suède. Cet aspect est ‘’fondamental’’, selon le FMI, notamment en situation de crise. Car les banques publiques et les entreprises de service public disposent alors des ressources nécessaires pour, entre autres, subventionner l’octroi de prêts et la distribution d’eau et d’électricité pendant une crise comme l’actuelle pandémie, et promouvoir des objectifs de développement. ‘’La création de conditions de concurrence équitable entre les entreprises publiques et les entreprises privées aurait aussi des effets positifs, car elle favoriserait les gains de productivité et freinerait les velléités protectionnistes. Certains pays, notamment l’Australie et ceux de l’Union européenne, limitent déjà le traitement préférentiel accordé aux entreprises publiques. À l’échelle mondiale, il serait probablement possible de s’entendre sur des principes généraux qui encadreraient le comportement international des entreprises publiques’’, préconise le Fonds monétaire international.

Grandes et complexes

Les entreprises publiques sont souvent des ‘’poids lourds’’ de l’économie. Dans les pays émergents et les pays en développement, par exemple, le FMI fait savoir que 55 % des investissements totaux dans les infrastructures viennent d’entreprises publiques. ‘’Certaines sont aussi des multinationales et exercent leurs activités à l’échelle planétaire. Avec la multiplication des entreprises publiques dans les pays émergents, leur proportion parmi les 2 000 plus grandes entreprises du monde a doublé pour atteindre 20 % ces 20 dernières années. Leur actif se chiffre à 45 000 milliards de dollars, l’équivalent de la moitié du PIB mondial’’, relève le document.

Toutefois, la même source note que les rapports entre les États et les entreprises publiques ne vont pas toujours de soi. En fait, les États confient à ces entreprises des objectifs ou des mandats précis. Il s’agit notamment de la distribution de l’eau potable ou de l’électricité, ou la construction des routes que le secteur privé ne jugerait pas rentables. ‘’Cependant, il arrive souvent que ces mandats ne soient pas suffisamment financés, ce qui a des conséquences pour la population. Les entreprises publiques ne sont pas à la hauteur, dans de nombreux pays en développement où plus de 2 milliards de personnes n’ont pas accès à un approvisionnement en eau potable sûr et plus de 0,8 milliard de personnes à une source fiable d’électricité’’, regrettent les économistes.

Il est aussi relevé dans le communiqué que la surveillance des entreprises publiques est ‘’aussi problématique’’. En fait, nombre de pays ‘’ne possèdent simplement pas’’ la capacité requise. Pour le FMI, ‘’l’opacité’’ des activités des banques et autres entreprises publiques demeure un ‘’obstacle’’ à la responsabilisation et à la surveillance. Et aussi rend possibles l’accumulation et la dissimulation de dettes considérables que les États doivent ensuite éponger, à des coûts qui dépassent parfois 10 % de leur produit intérieur brut (PIB).  Dans de tels cas, le Fonds monétaire international précise que les résultats des entreprises publiques ‘’tendent à être inférieurs’’ à ceux des banques privées. Sur la base d’un échantillon d’environ 1 million d’entreprises réparties dans 109 pays, la productivité des entreprises privées dépasse en moyenne d’au moins un tiers celle des entreprises publiques. ‘’Ce piètre rendement est imputable en partie à une gouvernance défaillante. Dans les pays où la corruption est moins répandue, la productivité des entreprises publiques est plus de trois fois supérieure à celle des pays où la corruption est endémique’’, indique le FMI.

Il convient de noter aussi que, selon l’institution, l’internationalisation des entreprises publiques ‘’accentue’’ par ailleurs la perception qu’elles bénéficient d’un ‘’avantage déloyal’’ par rapport aux entreprises privées. Ceci en raison du soutien qu’elles obtiennent de l’État, notamment des prêts à bon marché ou des allègements fiscaux. ‘’Cette perception est présente depuis longtemps sur les marchés intérieurs, mais elle a récemment débordé des frontières nationales et elle risque d’entraîner le recours à des mesures protectionnistes’’, déplore l’institution monétaire internationale.

MARIAMA DIEME

Section: