La DGID à la conquête des citoyens

La Direction générale des impôts et des domaines a tenu, ce jeudi, sa rentrée fiscale 2020. Elle en a profité pour lancer son nouveau programme de recouvrement fiscal dénommé ‘’Yaatal’’. Il s’agit d’une stratégie de la DGID pour inciter les citoyens à payer l’impôt.
Le Sénégal veut compter davantage sur les citoyens pour financer les politiques publiques. A cet effet, le programme ‘’Yaatal’’ de la DGID a été lancé, hier, par le ministre des Finances. ‘’Yaatal’’ vise la mobilisation des recettes fiscales intérieures et la réforme de la gestion foncière. Il s’inscrit dans le cadre des réformes liées à l’adoption du gouvernement du budget programme entré en vigueur cette année et dont le nœud est la gestion accès sur les résultats.
Le programme ‘’Yaatal’’, en tant que politique de la DGID répondant au budget programme, a pour objectif de promouvoir la conformité fiscale des citoyens qui ne sont pas encore présents dans la base de données de la DGID. Il est aussi question de la maîtrise de l’information fiscale et de la gestion foncière, en termes de recouvrement d’impôt.
Pour mettre en place un tel programme, ‘’la DGID est partie du constat que 97 % des entreprises au Sénégal évoluent dans l’informel et que plus de 90 % du foncier est également géré de manière informelle. Cette situation a pour conséquence une faible participation à l’impôt, mais aussi une faible durée de vie de ces entreprises qui ferment portes au bout de 5 ans d’existence seulement’’. Aussi, des études de l’ANDS ont montré que le potentiel fiscal du pays tourne autour de 25,1 % du PIB et qu’en 2018, le taux de pression fiscale, c’est-à-dire la recette fiscale rapportée au PIB, était de 15 %. Ce qui donne un gap de plus de 10 % par rapport au potentiel de recettes.
‘’Le nombre de contribuables gérés par la DGID tourne autour de 85 mille dont seuls 25 mille payaient effectivement. En rajoutant à ces 25 mille les salariés du secteur public et privé soumis aux prélèvements de l’impôt par le biais de la retenue à la source dont le nombre est de 450 mille personnes, on se retrouve avec moins de 500 mille cotisants directs. Ce chiffre, rapporté à la population active qui est estimée à près de 6 millions de personnes, montre l’écart extrêmement important qui pose des problèmes de démocratie et des équilibres dans la contribution des financements de nos politiques publiques. C’est à partir de ce constat que nous avons voulu mettre en place un programme en 2020, qui coïncide avec la mise en œuvre du budget programme. La Direction générale des impôts et des domaines a comme programme la mobilisation des recettes fiscales intérieures et la gestion foncière dénommé ‘’Yaatal Natt, Teggi Yokkuté’’. Ce programme vise à promouvoir la citoyenneté fiscale et l’accès équitable au foncier, explique Bachir Samba Niass, DG des Impôts et des Domaines.
En outre, cette incitation aux citoyens et aux entreprises à se conformer à la législation fiscale, avec le lancement du programme ‘’Yaatal’’, a surtout pour objectif le recouvrement budgétaire pour le financement des politiques publiques. ‘’Une stratégie inclusive a été élaborée pour prendre en charge les questions particulières des satisfactions des besoins de financement du PSE. Dans le sillage de la nouvelle mesure de budget programme, notre département a conçu une stratégie de mobilisation des recettes à moyen terme, appelée à être le cadre unique de coordination de l’action du gouvernement pour une mobilisation efficiente des ressources publiques. Cette démarche participative vise à garantir une cohérence globale de l’action des administrations pourvoyeuses de recettes. L’objectif est de financer l’émergence par nos propres ressources, tout en créant des conditions de développement d’un secteur privé fort’’, a expliqué à son tour le ministre des Finances Abdoulaye Daouda Diallo.
Il indique, par ailleurs, que malgré la faible participation, le bilan de 2019, en termes de recouvrement fiscal, reste satisfaisant. Toutefois, souligne-t-il, il faut plus d’efforts pour pouvoir financer les politiques publiques. ‘’Sur un objectif de recette de 1 600,8 milliards, la DGID a réalisé, en 2019, plus de 1 619,8 milliards, soit en glissement annuel une augmentation de plus de 278 milliards et en valeur absolue plus de 21 %. Au demeurant, la mobilisation des ressources internes reste un défi, au vu des besoins de financement très importants pour la réalisation des projets du PSE2 estimés à plus 14 000 milliards dont plus de 60 % doivent provenir de nos recettes intérieures’’, indique-t-il.
Optimiser l’assiette fiscale par le foncier
Toujours pour optimiser le recouvrement fiscal, le programme ‘’Yaatal’’ se veut la promotion de l’accès aux terres pour les populations. Il s’agit de faciliter et d’accélérer l’immatriculation des terres, pour permettre aux propriétaires d’avoir des titres fonciers et, par ricochet, de payer les impôts dus. Ainsi, le volet domanial du programme ‘’Yaatal’’ a pour objectif de faire en sorte que le foncier serve de levier pour fortifier les entreprises qui sont dans la base de données de la DGID, par des allégements d’impôts. ‘’Le programme ‘Yaatal’a un volet foncier qui vise à approfondir l’assiette fiscale, avec un recrutement massif de contribuables et la mise à disposition du foncier. Cela passe par un cadastrage universel, une maitrise de l’assiette et la modernisation. C’est pourquoi nos composantes pour le programme ‘Yaatal’sont à trois niveaux : l’adaptation législative, la promotion de l’adhésion des citoyens et les mesures d’accompagnement à mettre en place’’, fait savoir le DG des Impôts et des Domaines.
En effet, pour le volet adaptation législative, la DGID entend simplifier davantage les procédures pour inciter les entreprises informelles à se formaliser, afin de leur garantir l’équité dans le traitement. Il est aussi prévu de réviser les procédures foncières pour faire de l’accès aux terres ‘’un levier pour le développement des entreprises et l’épanouissement des ménages’’, avec comme objectif porter la proportion des terres immatriculées à 30 %, à l’horizon 2023. ‘’Nous voulons faire du foncier un levier de développement pour la population. Nous allons, dans ce sens, déployer le programme cadastrage national. Nous avons déjà démarré dans le quartier d’Ouest Foire pour faire le recensement et la régularisation. L’idée n’est pas d’immatriculer les forêts, mais les occupations en termes d’industriel, d’agricole ou d’habitation, en collaboration avec les services d’urbanisme, pour simplifier les procédures’’, renseigne le DG.
ABDOULAYE DAOUDA DIALLO, SUR LES TITRES D’EXONERATION AU PRIVE ‘’Plus de 35 % des titres d’exonération ont été détournés’’ Venu assister à la rentrée fiscale coïncidant avec le lancement du programme ‘’Yaatal’’, le président du Conseil national du patronat (CNP) a profité de l’occasion pour interpeler le ministre des Finances sur les problèmes de délivrance des titres d’exonération et des agréments au Code des investissements. ‘’Les retards enregistrés, depuis le début de l’année, engendrent au niveau des entreprises d’importantes pertes, surtout financières, ainsi que la non-exécution, dans les délais, du planning d’activités et d’investissements. Cette une urgence. Il est de mon devoir de le souligner et de vous sensibiliser en conséquence’’, a lancé Baidy Agne à l’endroit du ministre Abdoulaye Daouda Diallo. Qui n’a pas tardé à répondre. Selon le ministre des Finances, ce problème est lié au détournement des titres d’exonération par certaines sociétés évoluant dans le secteur privé. ‘’Je suis conscient de vos problèmes, en ce sens. C’est l’occasion justement d’inviter toutes les parties à un meilleur civisme fiscal. En effet, j’avais commandité une étude au niveau du ministère, à travers son Inspection générale des finances. Nous avons constaté que plus de 35 % des titres d’exonération ont été détournés. Il a fallu ainsi revoir la situation. Je comprends, c’est effectivement difficile. Je ne peux pas indéfiniment continuer à bloquer ces titres. Mais nous devons ensemble travailler à trouver la solution et tout faire pour éviter que ces avantages ne puissent être détournés au profit des secteurs qui n’en sont pas les ayants droit’’, a souligné Abdoulaye Daouda Diallo. |
ABBA BA