Publié le 24 Jan 2019 - 13:19
MOTS CHOISIS 

« La Belle du Caire »

 

Naguib Mahfouz  Prix Nobel de littérature 1988 Editions   Denoël

 

La Belle du Caire, un roman mais surtout un coup de cœur !

Le génie de Naguib Mahfouz est de savoir faire promener son lecteur dans le Caire des années 30  et de peindre cette société avec des mots précis, décrivant les tares et les vices qui l’ont gangrenée, les déviations qui l’ont désorientée…

La Belle du Caire aurait pu être titré « Les ambitions bâtardes » ou simplement « Baste », devenu ici un juron qui résume à lui seul une certaine philosophie de la vie du personnage central de ce roman, Mahgoub.

La communauté de vie en foyer universitaire tisse des amitiés fortes qui soit se solidifient si le sort fait que les destins se croisent  ou simplement se distendent  si l’avenir disperse les vies au gré des ambitions contraires.

Ils sont jeunes, ils sont quatre, issus de milieux différents, ayant des sensibilités différentes, subissant des influences philosophico-religieuses différentes et pourtant unis dans leur destin présent d’étudiant à la faculté du Caire et résidant tous ensemble  au foyer universitaire. L’un est socialiste, le second traditionnaliste, le troisième aime la vie et la pensée positiviste d’Auguste Comte et le quatrième lui, n’est concerné par rien et n’a qu’une réponse aux questions qui assaillent le monde : « baste ». Ils se prénomment Ali Taha, Ma’moun Radwan, Ahmed Badir et Mahmoug Abd el-Dayim. Ils ont la beauté de leur jeunesse, la naïveté de leur âge et  un fol espoir en l’avenir…

Les ambitions naissantes et dévorantes à la fin des études vont venir « infecter » cette belle entente et le venin est cette belle Ishanne, « fille de dix huit ans au teint d’ivoire, avec de beaux yeux que le noir tranchant de la pupille et les cils effilés dotaient d’un charme ensorceleur, et qui, par le contraste harmonieux entre ses cheveux de jais et la blancheur de sa peau, captivait les regards. En outre, elle cachait sous son manteau gris un corps souple et épanoui, plein de charme et d’incandescence. »  Elle est comme ces femmes venues d’ailleurs et précisément du désert dont Balzac disait dans Misères et Splendeurs des courtisanes, « qu’elles avaient quelque chose d’extraordinaire, un regard lumineux qui semble contempler une lumière dans l’infini. » Aussi, avait-elle une conscience aigue de deux choses : sa beauté et sa pauvreté.

A cette Ishanne, Ali Taha, follement amoureux avait tout promis comme le font souvent les jeunes garçons épris et éblouis par une certaine beauté. A Ali Taha, elle n’avait presque rien promis comme le font souvent les filles de cette espèce qui n’ont que  leur beauté pour gravir les échelons de la société. Elles se donnent souvent au plus offrant, préférant se réjouir plutôt que de jouir comme toutes les jeunes filles dont l’amour a déserté le cœur.

Parce que changer de conditions sociales et se réjouir étaient sa préoccupation, elle accepta le marché du puissant Qasim bey Fahmi, riche aristocrate avec la complicité de Mahgoub, cet amoureux secret  qui fantasmait sur elle à l’insu de Ali Taha et uniquement préoccupé par sa réussite sociale.

Ce besoin fait naitre en lui une ambition démesurée doublée d’une ingratitude envers tous les autres y compris sa famille d’origine plongée dans le dénuement total. Pour arriver à ses fins, il   accepte une union en « communauté de jouissance » avec le riche aristocrate et Ishanne…

Les amitiés s’effritèrent et l’adage selon lequel c’est notre caractère qui sera notre destin se confirma encore ici. Mahgoub  ne s’était jamais soucié de ses amitiés, il a toujours pensé que lui de son côté, le monde de l’autre et aujourd‘hui, plus qu’hier, les liens qui le tenaient aux autres se rompent le plongeant ainsi dans une profonde solitude.

Il paya la trahison à ses dépens avec la déchéance qui s’ensuivit et comment !!!

Et Ishanne ?

Et le trio d'amis restés solidaires, Ali Taha, Ma’moun Radwan et Ahmed Badir,  que deviendront-ils ?

Formidable roman peignant les travers d’une société corrompue qui ne reconnaissait aucunement  le mérite. L’amour avec son côté charmant tout aussi qu’avec son côté odieux est décrit ici avec mots si justes, si précis et cette question importante tout en marge,  qui est de savoir si c’est l’amour qui conduit au mariage ou si c’est le mariage qui conduit à l’amour ?

Ce roman est sans conteste l’un des meilleurs de l’écrivain égyptien Naguib Mahfouz, souvent présenté comme le chroniqueur de la vie égyptienne nous décrivant le quotidien de son peuple comme nul autre. Il aura inspiré beaucoup d’autres…

La Belle du Caire nous rappelle une autre Belle…, La Belle du Seigneur d’Albert Cohen, un magistral roman, un chef d’œuvre, un pavé   élaboré sur plus de 900 pages décrivant les amours du diplomate Solal, fils de rabbin et  d’Ariane Corisande d’Auble, issue d’une famille de la vieille noblesse calviniste de Genève,  épouse du brave Deume, fonctionnaire belge à la SDN (Société Des Nations). Un très bel ouvrage sur lequel je reviendrais certainement dans mes publications ultérieures.

Naguib Mahfouz est l’auteur de trente sept romans et de treize recueils de nouvelles. Il a reçu le prix Nobel de littérature en 1988 et, est le premier écrivain de langue arabe à le recevoir. Il est mort le 30 août 2006.

Ameth GUISSE

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