Publié le 12 May 2023 - 17:24
NÉGOCIATIONS ENTRE LE FMI ET LE SÉNÉGAL

L’État décroche 1 150 milliards F CFA pour 3 ans

 

Le Sénégal a conclu, hier, avec le Fonds monétaire international, un nouveau programme sur trois ans (juin 2023-juin 2026) d'un montant de 1 150 milliards F CFA. Il repose sur quatre piliers, dont le renforcement de la gestion des finances publiques.

 

Après deux semaines de négociations, le Sénégal et le Fonds monétaire international (FMI) ont trouvé un accord pour nouveau programme économique et financier avec décaissement de trois ans, couvrant la période juin 2023-juin 2026. La somme de 1 150 milliards de F CFA sera mobilisée pour ce programme qui a deux composantes. La première est un programme traditionnel que le FMI a eu dans le passé avec le Sénégal. L'autre composante porte sur les changements climatiques ; une nouvelle facilité que le FMI a adoptée en octobre de l'année passée, disponible à tous les membres. Cette composante est financée à près de 300 millions de dollars sur les trois ans.

Ainsi, ce nouveau programme est articulé autour de quatre piliers : le renforcement de la gestion des finances publiques ; le renforcement de la gouvernance financière et l’amélioration du dispositif anti-blanchiment des capitaux et la lutte contre le financement du terrorisme ; la réalisation d’une économie plus résiliente et inclusive ; et le renforcement de la résilience aux changements climatiques.

Dette

Concernant le volet des finances, les réformes s’articuleront autour du renforcement de la mobilisation des recettes fiscales, en vue d’atteindre au moins un taux de pression fiscale de 20% à l’horizon 2025, pour permettre d’atteindre une cible de déficit budgétaire communautaire de 3% à cette échéance.

Il faut aussi souligner que la dette du Sénégal a augmenté, ces dernières années, principalement à cause des différents chocs (Covid-19, guerre en Ukraine, flambée des prix internationaux sur les produits pétroliers et alimentaires). Elle s'élève, à la fin 2022, à peu près 76 % du PIB. ''Quoique la dette soit soutenable, il est important de la mettre dans une tendance baissière, afin de créer une marge de manœuvre, en cas de futurs chocs émergents'', indique le chef de mission du FMI pour le Sénégal, Edward Gemayel.

Pour cela, il y a une consolidation au niveau du Budget. Elle consiste principalement à augmenter les recettes internes qui sont actuellement estimées à 18 % du PIB avec l'objectif d'atteindre 20 % du PIB hors hydrocarbures, d'ici 2025. L'augmentation des recettes va principalement reposer sur le renforcement de l'Administration, mais aussi un effort par rapport aux exonérations fiscales (6-7 % du PIB).

''Les actions de maitrise de la dette seront renforcées pour accélérer la baisse de l’encours actuel de 68,2 % du PIB (soit en dessous du plafond communautaire de 70 %) qui s’établira à 65,8 du PIB, dès 2024. Également, la dette des entreprises publiques et parapubliques, estimée à 7,8 % du PIB, fera l’objet d’un suivi particulier’’, soutient le ministre des Finances et du Budget, Mamadou Moustapha Ba.

Réduction des subventions

L'autre axe de ce volet ‘’Renforcement de la gestion des finances publiques’’ consiste à aider dans la consolidation fiscale, en maitrisant les subventions.

En effet, le gouvernement s'était engagé, au début de l'année, à les réduire graduellement afin de les éliminer d'ici 2025. ''Les efforts de rationalisation des subventions seront poursuivis durant le nouveau programme. Celles-ci passeront, déjà pour le secteur de l’énergie, de près de 1 000 milliards en 2022 à 450 milliards en 2023'', annonce le ministre des Finances.

Cependant, note-t-il, par un meilleur ciblage de ces subventions, les populations vulnérables seront préservées. À titre illustratif, il a parlé de la subvention sur le gaz butane qui est de 1 123 F CFA, soit 28 % de son prix normal. Il rassure que cette subvention sera maintenue pour ces populations, de même que celle de 27 F CFA par kilowatt/heure consommé sur la tranche sociale, soit 20 % du coût réel. Pour le gasoil, l’État continue à supporter 65 F CFA/litre, soit 8 % par rapport aux prix réels. 

Concernant la gouvernance financière et l’amélioration du dispositif anti-blanchiment des capitaux et la lutte contre le financement du terrorisme, les réformes porteront notamment sur le renforcement des attributions de l’Ofnac et la mise en œuvre accélérée des recommandations du Groupe d’action financière (Gafi) pour améliorer la position du Sénégal. Également, le renforcement de la Déclaration du patrimoine et l'élargissement de son champ sont attendus.

Le dernier point de cet axe vise à promouvoir un nouveau Code de déontologie par rapport à tout qui est en rapport avec la gestion des affaires publiques. De plus, des mesures bientôt finalisées devront permettre au pays de sortir de la surveillance renforcée (liste grise).

Bourse de sécurité familiale : augmentation de la base des bénéficiaires 

En ce qui concerne le troisième axe : ‘’Renforcement de la résilience et de l’inclusive de l’économie’’, il s’agira, d’une part, de poursuivre les efforts d’amélioration de l’environnement des affaires et de l’attractivité de la destination Sénégal, à travers notamment l’adoption d’un nouveau Code des investissements.

D’autre part, en matière de protection sociale, la base des bénéficiaires de bourses de sécurité familiale sera portée à un million de ménages contre 316 000 F CFA actuellement et le montant de cette bourse, relevé à 35 000 F CFA contre 25 000 F CFA le trimestre présentement, annonce le ministre des Finances et du Budget.

En augmentant ce nombre de ménages, il y aura plus de ciblages, quand il y aura un choc. En même temps, cela permettra au gouvernement, au lieu de généraliser, d'apporter une assistance assez ciblée.

Ainsi, l'objectif est d'améliorer le système de protection sociale et de promouvoir surtout le développement du secteur privé. Ceci consiste principalement à renforcer le secteur privé par le secteur privé, à travers la création de nouveaux emplois, à solidifier le système financier, à réduire les inégalités basées sur le genre et à renforcer le système de protection sociale. 

Enfin, concernant de la résilience climatique, axe important de ce nouveau programme, il s’agira principalement de soutenir les objectifs du gouvernement en ce qui concerne l'atténuation et l'adaptation au changement climatique. Ce, à travers la mise en œuvre d’une batterie de réformes institutionnelles, organisationnelles et budgétaires, pour mieux prendre en charge cette nouvelle problématique dans les politiques publiques. Cela permet au gouvernement de respecter ses engagements internationaux sur cette question. Il y a aussi l'idée d'intégrer tout ce qui est en relation avec le changement climatique dans le processus budgétaire. 

''Tous ces quatre piliers permettront au gouvernement d'exécuter des réformes économiques et financières. Si tout va bien, nous voyons les perspectives économiques, avec ces réformes, de façon favorable. Et si la production pétrolière a lieu, la croissance pourrait être au-delà des 8%'', se félicite Edward Gemayel.

BABACAR SY SEYE

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