Les pays africains invités à réduire considérablement le coût d’envoi, avec la Zlecaf

Dans le cadre de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf), les pays africains devraient réduire considérablement le coût de l’envoi d’argent liquide sur le continent, afin d’aider les économies africaines à mieux se reconstruire. C’est le plaidoyer qu’ont fait la Commission économique pour l’Afrique (CEA) et l’Initiative ONE Campaign, dans un rapport sur les envois de fonds des migrants dans le contexte de la pandémie de Covid-19, rendu public avant-hier.
La pandémie de Covid-19 fait des ravages économiques dans le monde entier et aura de ‘’graves répercussions’’ en Afrique. La Commission économique pour l’Afrique (CEA) estime que, dans la meilleure des hypothèses, la croissance économique du continent pourrait se contracter de 1,4 point de pourcentage en 2020. Ce qui poussera près de 5 millions de personnes dans l’extrême pauvreté. Pour les expéditeurs et les destinataires des transferts de fonds, la CEA relève que la Covid-19 s’est traduite par des pertes d’emplois et la baisse de revenus.
‘’Les migrants sont surreprésentés dans nombre des pays qui sont les plus touchés par la pandémie. Si les migrants font moins de 4 % de la population mondiale, ils représentent au moins 8 % de la population dans six des dix pays où le nombre des cas de Covid-19 est le plus élevé (au 5 juin 2020). Les riches économies d’Amérique du Nord, d’Europe et du Moyen-Orient accueillent également une grande partie des migrants africains et sont à l’origine de plus de la moitié du total des envois de fonds vers l’Afrique’’, lit-on dans un rapport sur les envois de fonds des migrants dans le contexte de la pandémie de Covid-19 rendu public avant-hier et produit par la Commission économique pour l’Afrique (CEA) et l’initiative ONE Campaign.
En général, la même source souligne que les expéditeurs paient une prime qui est ‘’négativement corrélée’’ au montant de l’argent envoyé. Par exemple, le coût mondial médian d’un envoi de 500 dollars est de 5 %. Cependant, le coût de l’envoi de 200 dollars est de 7 %, selon les statistiques de 2020 de la Banque mondiale. ‘’Curieusement, ce sont les banques qui font payer le plus cher l’envoi de 200 dollars, soit des frais d’environ 11 % de la somme envoyée. En 2017, les expéditeurs ont payé environ 30 milliards de dollars en frais (Money and Banking, 2018)’’, rapporte le document.
Au niveau mondial, il est relevé que les coûts des transferts de fonds restent ‘’relativement élevés’’ par rapport à la cible de 3 % fixée dans l’Objectif de développement durable 10. ‘’Les frais de transfert vers l’Afrique varient considérablement d’un couloir de transfert à l’autre, et il faudrait redoubler d’efforts à l’échelle mondiale pour réduire les frais de transfert et aider le continent à atténuer l’impact socioéconomique de la pandémie de Covid-19’’, renchérit le rapport.
Bien qu’elle compte le plus grand nombre de personnes vivant dans la pauvreté, notre source informe que l’Afrique est la région où les frais de réception d’un envoi de fonds sont les plus élevés, avec un coût moyen de 8 % (contre 5 % pour l’Asie du Sud). C’est également le continent où le coût des envois d’argent est le plus élevé, avec près de 14 %, d’après la Banque mondiale. ‘’Au niveau intrarégional, le coût des transferts de fonds reste élevé, en particulier dans les couloirs suivants : l’Angola vers la Namibie, la Tanzanie vers le Rwanda et le Nigeria vers le Togo. Dans le cadre de la Zone de libre-échange continentale africaine, les pays africains devraient réduire considérablement le coût de l’envoi d’argent liquide sur le continent, afin d’aider les économies africaines à mieux se reconstruire’’, préconisent la CEA et l’initiative ONE Campaign.
Une baisse de 67 milliards de dollars des envois de fonds prévue en 2020
Il convient de noter également qu’au-delà de la perte de revenus, le rapport montre que des millions d’expéditeurs ont également éprouvé des difficultés à envoyer de l’argent à leurs proches pendant la période de confinement. Et il est dénombré 1,7 milliard d’adultes non bancarisés dans le monde, dont 75 % possèdent un téléphone portable qui pourrait leur faciliter l’accès aux services financiers. ‘’Les sociétés de technologie financière (par exemple, les opérateurs de télécommunications) pourraient contribuer à réduire les coûts des transferts de fonds, en facilitant l’accès et en accélérant le processus de compensation et le règlement des transactions (ONU, 2020). En Afrique, les envois de fonds devraient diminuer de 21 % pour descendre à 67 milliards de dollars en 2020, réduisant ainsi à néant six années de progrès’’, renseigne le document.
Ainsi, pour augmenter les transferts de fonds pendant la crise de Covid-19, les responsables de la CEA et l’Initiative ONE Campaign estiment que les ministres des finances du Groupe des Vingt devraient ‘’modifier’’ leurs régimes nationaux de transferts de fonds ainsi que les réglementations bancaires connexes. Ceci, afin de ramener le coût des envois de fonds à un niveau proche de zéro jusqu’à la fin de la pandémie.
‘’Ils doivent ensuite faire en sorte que le coût des envois de fonds ne dépasse pas 3 %, comme convenu dans l’Objectif du développement durable 10. Les gouvernements devraient promouvoir la numérisation de la chaîne de valeur des transferts de fonds, de l’expéditeur au destinataire, afin d’augmenter les volumes, de réduire les coûts et de faciliter l’envoi d’argent’’, suggère le rapport.
Les gouvernements sont également appelés à offrir des ‘’incitations fiscales’’ aux prestataires de services de transfert de fonds. L’objectif étant de réduire les frais, tout en assouplissant les exigences strictes de ‘’connaissance de l’identité du client’’ pour les petites transactions. ‘’Tous les pays devraient inclure les travailleurs migrants dans les programmes de protection sociale et de relance, et prolonger les visas afin que les migrants puissent continuer à travailler et à envoyer de l’argent dans leur pays d’origine. Les gouvernements devraient permettre de classer les opérateurs de transfert de fonds parmi les entreprises essentielles, afin qu’ils puissent rester en activité pendant les périodes de confinement’’, ajoute le document.
Pour les pays à revenu faible et intermédiaire, ils sont invités à établir des filets de sécurité ou renforcer ceux qui existent déjà au bénéfice des ménages ruraux qui dépendent fortement des transferts de fonds.
Ce faisant, la CEA et l’Initiative One Campaign pensent que les pays soutiendront l’effort mondial visant à limiter l’impact socioéconomique de la pandémie. Cela est particulièrement vrai pour les transferts de fonds intra-africains. ‘’Les transferts de fonds africains pourraient servir d’instrument d’appoint pour favoriser une transformation économique, en apportant un soutien dans des domaines aussi stratégiques que le développement des petites et moyennes entreprises, la sécurité alimentaire et l’investissement dans les chaînes de valeur régionales en vue d’approvisionner les marchés africains et de renforcer les capacités de production. Les discussions actuelles concernant la mise en place d’un système de paiement à l’échelle du continent et des systèmes de paiement transfrontaliers interopérables détermineront la dynamique des transferts de fonds intra-africains dans les années à venir’’, rapporte le document.
MARIAMA DIEME