Publié le 11 Aug 2019 - 17:19
HAUSSE PRIX OIGNON ET POMME DE TERRE

Les raisons de la flambée des prix

 

Le constat est général : le prix de l’oignon et de la pomme de terre ne cesse de grimper, à l’approche de la fête de Tabaski. Le directeur de l’Autorité de régulation des marchés (Arm), Amadou Abdoul Sy, des commerçants et Emile Sène de l’Uncs expliquent le phénomène.

 

Dans ce pays, il est de notoriété publique que ce sont les commerçants qui font la loi. Cette veille de fête de la Tabaski ne déroge pas à la règle. Les ‘’gorgorlus’’ continuent de ployer sous le poids de leurs desiderata. Sous le regard impuissant des autorités. Ainsi, le marché sénégalais est marqué par une hausse du prix de l’oignon et de la pomme de terre. Ceci bien que le marché soit bien ravitaillé.

En réalité, le chargé de la sécurité en approvisionnement en denrées alimentaires du marché de l’Union nationale des consommateurs du Sénégal (Uncs) signale qu’on est en fin de la période de production locale. ‘’Pour l’oignon, il y en a encore, mais les commerçants vont automatiquement faire de la rétention et procéder à une hausse des prix. L'oignon est allé jusqu’à 500 F Cfa le kilo. Pour la pomme de terre aussi, l’Etat est en train de protéger la production locale, notamment Seneguindia. Ce qui fait que le marché est correctement approvisionné, mais avec des prix relativement élevés. Ils ne seront pas aussi bas que l’on espérait’’, souligne Emile Sène.

Emile Sène (Uncs) : ‘’La stratégie de l’Arm est de protéger la production locale.’’

Pour ce consumériste, normalement, on devrait avoir un ‘’stock tampon’’ pour réguler les prix. ‘’Les importations devraient être présentes au mois de juillet ou la veille, pour que les gens qui vont tenter d’augmenter les prix reviennent à de meilleurs sentiments. La stratégie de l’Arm est de protéger la production locale et quand il y a risque de pénurie, on fait appel au dégel des importations. Cette ouverture régulerait le marché, mais les productions locales allaient en pâtir. Chaque acteur essaie de gagner le maximum’’, regrette M. Sène.

Il estime qu’à un moment donné, ce sont les importateurs qui cherchent à ‘’écraser’’ les producteurs locaux. Or, ce sont ces derniers qui ‘’mettent la pression’’ sur l’Etat pour qu’on ne lève pas l’importation. ‘’En tout cas, c’est le consommateur qui est entre le marteau et l’enclume. Si on achète le kilo de pomme de terre à 600 F Cfa à Dakar, cela veut dire que dans les autres régions, il peut aller jusqu’à 700, voire 800 F’’, déplore ce défenseur des consommateurs.

Au marché de Thiaroye, chez les grossistes, les prix sont fixés selon la qualité des produits. ‘’Le prix de l’oignon varie entre 350 et 400 F Cfa en gros. Ça dépend de la qualité. Pour le sac de 25 kg d’oignon qui coûte 400 F Cfa le kg, c’est 10 000 F Cfa. On peut trouver sur le marché des prix plus bas. Pour une meilleure qualité, il faut au minimum débourser 10 000 F’’, renseigne Bécaye Ba, grossiste au marché de Thiaroye-Guinaw rail.

Concernant la pomme de terre, notre interlocuteur indique que le kilo est vendu en gros à 500 F Cfa. Le sac de 25 kg peut coûter 12 500 F et la meilleure qualité est celle venue de Cayar qui ‘’n’existe plus’’ sur le marché. Elle est vendue entre 15 000 et 16 000 F Cfa le sac de 25 kg. Pour la pomme de terre indienne, les prix varient entre 12 500 et 15 000 F au maximum.

‘’Maintenant, c’est au revendeur de voir à quel coût il va la revendre pour s’en sortir. Les prix sont devenus plus chers par rapport à la fête de Korité, parce que le stock qui était vers Fouta est épuisé. C’est l’oignon de la zone des Niayes qui dure plus longtemps sur le marché. Il vient notamment de Djender, Keur Matar, Mboro, etc.’’, informe-t-il.

Ce grossiste se réjouit du fait qu’ils aient des endroits appropriés pour conserver leurs produits. ‘’Cette année, nous avons eu la chance d’avoir des chambres froides pour stocker la pomme de terre. On l’a achetée à l’époque entre 175 et 200 F Cfa le kilogramme et on l’a stockée à Diamniadio. En plus, c’est du consommer local. Tout a été cultivé au Sénégal. Et même si les prix sont jugés élevés par les ménagères, il y a de la qualité. On a aussi des variétés qui peuvent coûter 250 F Cfa le kilo, mais ce ne sera pas de bonne qualité’’, dit-il.

Le Dg de l’Arm réfute toute ‘’flambée des prix’’

‘’Pendant la Korité, il y avait de l’oignon et de la pomme de terre qu’on vendait bord-champs. Alors que pour la Tabaski, la pomme de terre est sortie des chambres froides, après 5 mois de stockage. Donc, ce n’est pas la même chose’’, explique le directeur de l’Autorité de régulation des marchés (Arm), Amadou Abdoul Sy, au téléphone d’’’EnQuête’’.

Selon lui, l’oignon qui est actuellement sur le marché provient de la 3e période de production. ‘’Pendant la première période, on utilise des ‘sayanes’ (eaux stagnantes) ou des puits qui ne sont pas très profonds et la nappe phréatique n’est pas loin. Pour la 2e période, c’est l’eau des puits et la 3e, c’est l’eau des puits améliorés, des mini-forages et de la Sénégalaise des eaux (Sde)’’, dit-il.

Toutefois, M. Sy admet que le Sénégal a une économie ‘’très évènementielle’’. A la veille des fêtes, les gens arrivent à augmenter les prix. ‘’Mais cela ne veut pas dire que les prix vont flamber, contrairement à ce qu’une certaine presse a dit. Depuis le 17 juin jusqu’à la journée d’hier (Ndlr : jeudi), 18 450 t se trouvent sur le marché. C’est presque trois fois la consommation du Sénégal qu’on a mise sur le marché en 45 jours. Quand on a un produit jusqu’au détail, cela veut dire qu’il n’y a pas de grande pression sur la demande’’, affirme le patron de l’Arm.

Au fait, il fait savoir qu’il y a quelques poches où l’on note que les camions qui devaient venir sont en retard pour telle ou telle raison. Dès lors, ils ont agi sur le point le plus proche pour satisfaire la demande.

‘’Mais à deux jours de la fête, la situation n’est pas anormale. Actuellement, l’oignon vient de Potou, dans la région de Louga. Depuis quelque temps aussi, les prix ont augmenté. On est encore dans la production locale. La demande est couverte. Donc, on ne peut pas parler du dégel des importations’’, insiste-t-il.

MARIAMA DIEME

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