Publié le 28 Oct 2020 - 01:07
STRASBOURG

L’Habib ne fait pas le moine

 

Après un départ houleux du FC Metz, le buteur sénégalais s'impose déjà comme un élément essentiel à Strasbourg. La preuve ce dimanche à Brest, où Habib Diallo a déjà inscrit son deuxième but avec un club qu'il a rejoint au début du mois.

 

Il n’a pas célébré son but. Aussi belle sa tête plongeante soit-elle, Habib Diallo est un homme qui sait d’où il vient. Dans son parcours, il y a eu ce passage à Brest entre janvier 2017 et juin 2018. À cette époque, le Sénégalais galérait à faire son trou à Metz. Il y avait là-bas Mevlüt Erdinç qui plantait des buts et, quand le Turc s’est blessé, c’est l’immense Cheikh Diabaté qui l’a doublé. « Les gens pouvaient se poser des questions, c’était légitime, témoignait le formateur grenat Olivier Perrin. Mais même quand les vents ne sont pas dans le bon sens, il faut insister jusqu’à ce que l’éclosion se fasse.

Et Habib est un bouton de rose qui a mis du temps à éclore. » Mettre le cap à l’ouest, en Ligue 2, était alors un moyen pour le gamin de Thiès de prendre l’air et le large, sous la houlette de l’affectueux Jean-Marc Furlan. « Il n’y a qu'Habib qui peut dire ce que ce prêt lui a apporté, avançait ce dernier. Mais ça lui a quand même permis de changer de cadre et de se remettre en question. » Et visiblement, cette expérience a compté pour lui. Deux ans après son départ du Finistère et après deux saisons de haute volée à Metz (37 buts en L2, puis 12 en L1), Habib Diallo est revenu à Francis-Le Blé, y a marqué, mais comme il portait les couleurs d’un autre club, il a contenu sa joie pour réaffirmer à ce public que oui, il se souvient.

Aujourd’hui, Habib Diallo est strasbourgeois. Il a beau avoir eu du mal à se l’avouer, au moment de rejoindre le club alsacien dans les tout derniers instants du mercato, ce n’est pas pour autant qu’il a refusé la mission qui lui a été confiée. Ce dimanche, c’est lui qui a décoincé la situation en reprenant, dès la 26e minute, un centre d’Anthony Caci pour mettre le Racing sur les rails d’une précieuse seconde victoire cette saison. S’il a embelli cette première titularisation d’une passe décisive pour son compère Ludovic Ajorque, présageant d’une future idylle, l’attaquant a déjà montré à la bande de Thierry Laurey qu’il serait un atout considérable dans l’optique du maintien. Car c’était déjà lui qui avait sonné la révolte contre l’Olympique lyonnais, alors qu’il était entré à la 40e minute quand le score était de 0-3. En plantant deux buts lors de ses deux premières apparitions avec le RCSA, Diallo est devenu le premier à réaliser cette performance depuis Mickaël Pagis en 2004. La belle affaire.

Diallo de sourds

La belle affaire, ce sont surtout le FC Metz et Strasbourg qui pensaient l'avoir faite au début du mois. La vente de l'avant-centre avait été budgétisée par le club lorrain et il ne fallait plus que trouver un acheteur pour compenser les 14 millions d'euros dépensés pendant l'été et laisser définitivement la place à son successeur programmé, Ibrahima Niane. Mais pendant que les portes des clubs anglais (Tottenham et Sheffield, notamment) se fermaient une à une, Diallo était toujours dans le groupe de Vincent Hognon, se contentant de filer des coups de main en fin de match (en dehors d'une titularisation au Parc des Princes). Le Sénégalais était alors en attente dans un sas, le cul entre deux chaises. Et c'est finalement une offre d'un rival régional, Strasbourg, qui est tombée dans les tout derniers instants. En renard des surfaces, le Racing a bénéficié d'une ristourne (10 millions d'euros au lieu des 15 espérés) tout en récupérant l'arme principale d'un concurrent au maintien. Sur les réseaux ou sur les murs du siège messin, il n'a pas fallu longtemps pour que les supporters expriment leur colère de voir le club « brader » un joueur apprécié par Saint-Symphorien.

L'intéressé s'est aussi senti lésé dans cette histoire. Dans une conversation avec un fan, le Sénégalais laissait penser qu'il avait été trimbalé par son employeur. « Les supporters ne savent pas tout ce qui se passe au FC Metz. Si je signe à Strasbourg c'est pas de ma faute, c'est le club qui m'a forcé à partir, confiait-il. Entre Metz et Strasbourg, il y a quelque chose qui se passe. Il y a beaucoup de clubs qui ont mis bien plus, mais finalement c'est à Strasbourg que je signe.

Dimanche, j'ai dit que je voulais rester à Metz, mais ils n'ont pas voulu. Si je restais là-bas, je n'aurais pas joué, ils me l'ont dit carrément. » Une entourloupe qu'a niée le président lorrain, Bernard Serin : « Nous avons laissé les négociations se dérouler comme elles doivent se dérouler, entre les clubs d'une part et entre le joueur et le club acheteur d'autre part. » Après cet épisode houleux, Habib Diallo aurait pu cogiter, perdre son totem de buteur et se perdre en Alsace. Mais ses débuts sont venus infirmer tout ça. Et tant pis s'il doit encore jouer le héros dans une équipe embourbée dans le bas du classement, pendant que ses copains grenat font eux preuve de beaux progrès depuis le début de la saison. À coup sûr, il sera présent lors des derbys de l'Est, programmés en décembre et en février. Certainement, il y fera trembler les filets. Mais évidemment, il ne célèbrera pas. Parce que Habib sait d'où il vient.

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