Publié le 30 Oct 2017 - 23:39
AVANT-PREMIERE

‘’BurnOut’’ ou les tares de Casablanca

 

On prendrait ce film, par moments, pour une lutte des classes, puis une réconciliation des classes. Mais ce n’est rien de tout cela. ‘’BurnOut’’, du Marocain Nour-Eddine Lakhmari, est l’histoire de bourgeois et de pauvres vivant à Casablanca, chacun avec ses tares. Il a été projeté samedi dernier au cinéma Renaissance de Rabat en avant-première.

 

Après ‘’Casanegra’’ et ‘’Zéro’’, le réalisateur marocain Nour-Eddine Lakhmari vient de sortir ‘’BurnOut’’ qui, dit-il, clôture sa trilogie sur Casablanca. Le film est projeté samedi au cinéma Renaissance de Rabat en avant-première. Ce réalisateur de 53 ans s’intéresse à un choc des classes au sein de la capitale économique marocaine. Il oppose des habitants d’une banlieue de ce pays et ceux d’un quartier de riches. Des pauvres de différents niveaux à des riches de diverses catégories.

Ayoub, petit cireur, est au centre de cette histoire. Il fait le tour des grands boulevards de Casablanca chaque jour à la recherche de clients. Son rêve est de pouvoir économiser assez d’argent, 7 500 dirhams précisément (491 mille 967 F CFA) pour acheter une prothèse pour sa mère handicapée. Elle a perdu une jambe à cause d’un clou. Depuis, quand elle en voit dans la rue, elle les ramasse et les met dans un coin de sa chambre.

Elle a perdu son mari qui tentait de regagner l’Espagne par la mer. Son fils, aussi jeune soit-il, s’occupe depuis lors d’elle et s’investit de la mission de lui acheter une jambe artificielle. Chaque matin, il va devant une pharmacie en admirer une. D’ailleurs, le film s’ouvre sur un gros plan d’une de ces scènes. Au fil des séquences, il rencontre un jour Jad. Un jeune homme richissime qui, pourtant, n’est pas du tout heureux. Il en veut à son père qui a toujours voulu qu’il soit comme lui et non celui qu’il veut être. Ce dernier décédé, il décide de faire désormais les choses comme il les conçoit.

Il décide de divorcer d’avec celle qu’il lui avait choisie, de se débarrasser de l’entreprise qu’il lui a laissée et surtout de se consacrer à sa passion, les voitures. Son hobby, conduire une voiture de course à une vitesse folle. Chaque soir, il a son itinéraire pour cela. Il devient ami avec Ayoub, lâche ses amis de la bourgeoisie, cire des chaussures dans la rue ou encore danse. Il n’hésite pas à aller en banlieue rendre visite à son ami.

Il semble faire preuve d’humanité et de compassion en invitant Ayoub et sa famille au restaurant. Un palace plus que chic. L’on se demande alors si Jad connait réellement le sens de la priorité. Au lieu d’inviter 4 personnes à manger dans un pareil endroit, ne ferait-il pas mieux de payer à la mère d’Ayoub sa jambe artificielle ? Une aberration, surtout qu’il a entendu, au cours d’une discussion, le petit dire à sa mère que son rêve est de lui payer une prothèse.

Un autre contresens ou égarement dans ce film, c’est ce médecin interne, Aïda, obligée de se prostituer. Au Maroc, les internes sont payés. Qu’est-ce qui l’y oblige, on ne le montre pas dans le film. Tout ce que l’on sait, c’est que si elle avait le choix, elle ne le ferait pas, puisqu’elle est assez réticente.

‘’Une élite hypocrite’’

Nour-Eddine Lakhmari dépeint dans sa création une société marocaine avec une élite hypocrite. L’un des clients d’Aïda est un homme politique qui se bat tous les jours contre la légalisation de l’avortement. Pourtant, il n’hésitera pas à violer Aïda, et sa propre fille a recouru à un avortement clandestin dans un hôpital. A la fin du film, aucune perspective ne s’ouvre pour la jeune doctoresse. Le politicien, quant à lui, a été promu ministre de la Santé.

Il ne faut pas croire que seuls les riches sont hypocrites. Les pauvres également ont leurs vices. Un vieux de la banlieue, pédophile, violait lui aussi des enfants. Ce sont des tares comme ça qui n’ont pas souvent des liens que le réalisateur propose ici. Ayoub, lui, n’aura jamais l’argent pour sa prothèse, qu’il volera finalement et Jad se réconciliera d’avec sa femme.

Ce dernier opus de Nour-Eddine Lakhmari est techniquement bien travaillé. Les images sont très belles. Même la banlieue ne paraît pas en être une, tellement qu’il a su sublimer les images. Les seuls hics que pourraient soulever les critiques résident dans l’écriture du scénario.

BIGUE BOB (Envoyée spéciale à Rabat)

 

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