Publié le 2 Dec 2013 - 22:36
EN PRIVÉ AVEC… SOULEYMANE FAYE

‘’Macky Sall, la maison promise et Ibrahima Ndoye’’

 

Agé de 64 ans, marié et père d’enfants, Souleymane Faye fait partie des premiers chanteurs sénégalais qui ont eu à révolutionner la musique traditionnelle. Trouvé en pleine répétition à la Maison de la culture Douta Seck, il a accepté de se livrer à EnQuête en parlant de ses relations avec Macky Sall, la maison promise par ce dernier et pas encore reçue, ses relations avec les artistes et son opinion sur l’évolution du Sénégal.

 

Tout le monde connaît vos talents d’artiste mais à part le fait de chanter, Souleymane Faye a-t-il un autre métier ?

Je suis menuisier ébéniste. Je suis également  chorégraphe qui monte des ballets, metteur en scène, faiseur de cabaret et professeur de chants. Par la même occasion, je pense ouvrir une école pour y donner des cours professionnels de techniques vocales, chorégraphie, etc…

Vous plaisez apparemment aux sénégalais. Selon vous, c’est dû à quoi ?

C’est très motivant, cela m’encourage à aller de l’avant. Ce qui nous fait vivre, ce n’est pas l’argent, mais plutôt jouer, œuvrer, c’est ce qui maintient l’artiste.

Vos textes sont qualifiés de philosophiques. Travaillez-vous avec un parolier? 

J’écris moi-même. Je n’ai pas besoin de m’inspirer. J’écris ce que je vis tout simplement. Quand j’écris, je ne pense pas à l’argent. C’est pourquoi beaucoup de gens ont profité de moi.

A qui  pensez-vous ?

Pas la peine de citer des noms, ils se reconnaîtront. Nous  avons tous les mêmes problèmes : santé, boulot, famille, amour. Que l’on soit noir, blanc, jaune, pauvre, riche, c’est pareil, nous sommes des humains, donc nous ressentons les mêmes choses.

Vous avez récemment sorti un single intitulé ‘’Jeléti’’. Est-ce qu’il annonce un nouvel album ?

Non, il n'y a pas d’album en vue. Cela fait 16 ans que cette chanson est enregistrée. On attendait le moment propice pour le sortir, pour qu’il fasse un boom. Cela ne me surprend pas.

Un hommage à votre femme ou à quelqu’une d’autre ?

(Rires) Non du tout, mais je l’ai vécu. C’est peut-être avec la maman, la sœur. Bref avec une personne qu’on aime. Quand un couple l’écoute, chacun d’entre eux peut s’y retrouver.

Combien compte votre stock aujourd’hui, parlant de cassettes, cd, albums?

Vous savez au début, il n'y avait pas de cd. Je ne pensais pas à l’argent. Je voulais sortir mes œuvres, ce que j’ai dans le ventre. Chaque année, je sortais une cassette. Au total, j’ai sorti 14 cassettes et 5 cd, c’est beaucoup.

Peut-on dire que Souleymane Faye est un musicien riche ?

Oui je suis riche, très riche, mais d’une autre manière.  Il y a 2 types de richesse : une richesse visible et une autre invisible. Je suis très riche, parce que les gens m’aiment, ma famille aussi. C’est ça ma richesse.

Vous aviez chanté Macky Sall, alors qu’il n’était pas Président.  Qu’est-ce qui vous avait motivé ?

Vous savez, Macky avait une fois posé une question qui lui avait valu son expulsion. Il a juste dit ‘’Karim, où est passé l’argent’’. Juste pour ça, il a été expulsé. Ce n’est pas sérieux. Demander à quelqu’un de rendre compte rentre dans l’ordre normal des choses. C’est ce qui me faisait mal et m’a conduit à écrire cette chanson pour le soutenir.

A quelle occasion avez-vous connu Macky Sall ?

En 2007, je l’ai rencontré à Fatick. Il était directeur de campagne et 1er ministre. C’est de là-bas, qu’il m’a charmé. Quand je l’ai regardé, j’ai senti quelque chose en moi. Je me suis dit : celui-là, il peut être le futur Président des sénégalais. Je l’avais senti.

Est-ce qu’il a reconnu ce soutien que vous lui avez apporté ?

Il est devenu un ami. Il m’a reçu après son accession au pouvoir. Je lui ai fait part de mes projets et il a l’intention de m’aider. Je l’écoute avec toute la patience qu’il faut.

Il se serait passé des choses avec le conseiller culturel du Président lors de cette audience. Que s’est-il passé avec Ibrahima Ndoye ?

En fait, je suis un peu déçu. Quand j’ai été voir le président Macky Sall, il m’a mis en rapport avec Ibrahima Ndoye, un de ses proches, pour  qu’il m’achète une maison. Depuis lors, sans suite.

Comment ça ?

Je ne l’ai plus revu. Il a disparu. Quand je l’appelle, il ne prend pas. Je lui envoie un sms, il ne réagit pas. Je l’ai perdu de vue le jour de l’audience. Cela fait un an...

Souleymane Faye pourrait-il descendre dans l’arène politique un jour ?

Je n’aurai jamais le temps. La politique demande une disponibilité. Par contre, je peux être un très bon conseiller.

Comment appréciez-vous la gouvernance de Macky Sall ?

Macky vient à peine de commencer, prenons le temps d’observer pour voir.  Je ne peux rien dire pour le moment. Et puis, il y a beaucoup de rancune, parce qu’il a demandé aux fauteurs de rembourser. Macky n’est ni un rancunier ni un bavard. Les milliards détournés doivent être remboursés par la force. A sa place, je ferais la même chose. Ils ne sont pas des intouchables. Le règne d’Abdoulaye Wade ne nous a pas plu.

Comment se portent vos relations avec les musiciens ?

Quand quelqu’un a du talent, tout le monde l’aime. Il y a trop de concurrence dans le milieu. Si vous vous rendez compte que quelqu’un fait quelque chose mieux que vous, il faut l’accepter sans complexe. Les musiciens d’aujourd’hui ne s’entendent pas. Il y a toujours entre eux tiraillements, jalousie,  méchanceté, maraboutage et autres.  Ce n’est pas bon pour quelqu’un qui veut avancer.

Vous travaillez à Dakar et vivez à Saint-Louis, pourquoi ce choix, apparemment difficile ?

La famille vit bien à Saint-Louis, moi aussi. Dakar est cher, on dépense tout ce qu’on gagne pour survivre. A ce rythme, je risque de travailler jusqu’à la retraite sans une seule maison pour la famille.

Vous faites une musique qu’on peut difficilement ranger dans une catégorie. Si vous deviez la définir que diriez-vous ?

Ma musique est ouverte. C’est une variété faite de rock, de blues, de mbalax, de jazz, de reggae, de pop, et le tout en wolof.

Est-ce que Souleymane Faye joue à l’étranger ?

Le 05 décembre, nous serons à Paris  avec Xalam 2 pour un concert. Cela fait 27 ans que je n’ai pas joué à Paris.

Quel est le nom de votre orchestre ?

Il s’appelle Souleymane (rires), puisque les musiciens ne m’appartiennent pas. Ils font la valse. Je l’appelle Souleymane Faye. Celui qui vient m’y trouve, celui qui part, m’y laisse.

Que détestez-vous le plus  dans la vie ?

La jeunesse qui ne fait rien, cela m’énerve. A leur âge, on ne s’ennuyait pas. Quand je vois que les jeunes sont là, sans activité, désorientés, ça me met hors de moi.

Que désirez-vous le plus ?

Tout. Si ce sont des mets, pourvu qu’ils soient bien préparés.

MARIÉTOU KÂNE

 

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