Publié le 14 Jan 2012 - 14:24
Entretien avec boy kaïré

‘’Je vais servir une citation directe à Bathie Seras’’

Boy Kaïré

 

 

Boy Kaïré, est-ce un regret de finir votre carrière sur une défaite, dimanche contre Bathie Seras ?

 

Même si c’est une défaite, je prends cela comme une victoire. J’ai fait 27 ans dans l’arène et cela n’est pas donné à tout le monde. Mon rêve a toujours été de disputer mon dernier combat avec mon fils. Ce rêve s’est enfin réalisé. Quand mon fils a remporté son duel, je me suis dit que l’objectif était atteint. Si nous avions perdu tous les deux, cela aurait été plus grave. Si vous voyez le déroulement des combats, cela montre que je dois lui céder maintenant la place.

 

 

 

Est-ce un clin d'œil aux lutteurs de votre génération ?

 

C’était aussi pour sortir par la grande porte parce que je crois aussi qu’il faut être sincère envers soi-même. D’abord, savoir qu’on n’a plus la force des jeunes. Avec l'âge, lors de mes derniers combats, il me fallait faire des massages et beaucoup dormir après chaque entraînement. Alors que mon fils peut enchaîner trois entraînements en une seule journée sans sentir cette fatigue. Tous ces signes montrent que c’était maintenant la fin.

 

 

 

Dans votre carrière, il y a des hauts et des bas. Quels sont les moments qui vous ont le plus marqué ?

 

Les moments forts, ce sont les victoires. J’ai battu Eumeu Sène, Dame Soughère, Jules Baldé, Cheikhou Diène… Toutes les victoires étaient des moments de bonheur pour moi.

 

 

 

Et les moments difficiles ?

 

Ce sont surtout les défaites. Mais j’y tirais des enseignements. C’était un de mes points forts. J’étais entouré d’anciens qui me donnaient toujours des conseils et je leur vouais beaucoup de respect.

 

 

 

Vous en avez terminé avec la lutte, qu’est-ce qui vous reste maintenant ?

 

Je travaille au Casino où je suis embauché. Depuis 1992, je travaille, donc je continue d’œuvrer pour l’écurie Soumbédioune. Je veux aider les jeunes de l’écurie parce qu’il n’y a pas seulement Diène, il y a beaucoup de talents comme Bismi Ndoye, Cheikhou Diène et d’autres. Je vais faire tout pour que Soumbédioune soit parmi les meilleures écuries ; et le reste, c’est ma société. Je vais aussi bien me reposer parce qu’il est temps maintenant.

 

 

 

Nourrissez-vous des regrets de n'avoir pas croisé certains lutteurs durant vos 27 ans de carrière ?

 

On ne peut pas croiser tout le monde. Chacun souhaite rencontrer tous les lutteurs, mais c’est impossible. Il y a les jeunes qui viennent de se signaler et je ne peux plus lutter avec eux. Ce que je souhaite, c’est que les jeunes que j’encadre dans l’écurie -je ne parlerais pas uniquement de mon fils pour ne pas être égoïste- puissent en découdre avec eux et ils vont combler ce gap.

 

 

 

Est-ce que la lutte vous a rendu riche ?

 

En 1984, lorsque que je faisais mes débuts il n’y avait pas beaucoup d’argent dans la lutte. Si je me rappelle bien, en 1989 lors de mon premier grand combat, le cachet s’élevait à 100 000 F. Tout ce que j’ai fait dans la lutte, si c’était aujourd’hui, je peux dire que je serais milliardaire. J’étais fort en lutte et je respectais beaucoup les entraînements. Je remercie beaucoup le Bon Dieu qui m’a aidé à faire ce long parcours. Je souhaite à mon fils de faire plus, mais aussi à tous les jeunes de mon écurie. Il y a beaucoup d’anciennes gloires qui étaient fatiguées par le passé, mais aujourd’hui, leurs fils gagnent des millions et les aident maintenant.

 

 

‘’On est en train de salir les lutteurs pour 15 000 F’’

 

 

 

Vous avez parlé de sortir par la grande porte mais votre adversaire Bathie vous accuse de vouloir faire une combine...

 

Si vous voyez que j’ai apporté ce Coran, c’est pour confirmer ce que je dis (il met la main sur le Coran). Je crois en Dieu, j’ai beaucoup de respect pour moi, pour ma famille et pour tous les Sénégalais. Je respecte tout le monde. Je ne peux pas faire une si riche carrière pour que ce gosse se lève pour me salir. Je pense que c’est la victoire qui l’a emporté ou il s’est trompé. Tout ce qu’il a dit, c’est lui qui peut le clarifier et c’est ce que je lui demande. Je ne sais même pas où il habite, nous n’avons pas les mêmes fréquentations. Si je ne me trompe, à part la télévision, c’est notre combat qui a été notre premier face-à-face. Ce que je veux, c’est qu’il présente ses excuses ou qu'il apporte des preuves concrètes.

 

 

 

Et s’il n’apporte pas de preuves ?

 

Je le poursuivrai jusqu’au bout. Je vais lui servir une citation directe. Dans ce pays, les gens me respectent et je n’accepterais pas qu’on me déshonore. Il faut savoir que ce n’était pas évident que je croise le ''boy'' parce qu’il a fait quatre ans sans victoire. Son devoir, c’était de me dire merci à la fin du combat, comme l’ont fait Ness, Baye Mandione et Modou Lo.

 

 

 

Comment vivez-vous ce qui s’est passé à Mermoz (l’affaire Barthélémy Dias) où un lutteur a été tué ?

 

Je profite de l’occasion pour présenter mes condoléances à la famille de Ndiaga Diouf. Le message que je peux lancer, c’est de demander aux lutteurs de prendre leurs cartes d’électeurs et de voter comme le fait tout bon citoyen. Mais, aller se battre pour les politiciens, tout lutteur doit l’éviter. On est en train de salir les lutteurs pour des sommes de 15 000 F. Je lance un appel aux chefs d’écurie ; ils doivent prendre des mesures. Je n’accepterai jamais que quelqu’un vienne dans mon écurie pour prendre les jeunes et leur payer de maigres sommes à des fins politiques. Personne ne dédommagera celui qui vient de perdre sa vie.

 

Bachir Fofana

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