Publié le 16 Feb 2019 - 05:18
ABDOULAYE DIOUF SARR (MAIRE DE YOFF)

‘’Le soutien de Khalifa à Idrissa Seck nous arrange’’

 

Coordonnateur des cadres de l’Alliance pour la République, maire de Yoff et ministre de la Santé, Abdoulaye Diouf est de plain-pied dans la campagne électorale pour la réélection de son mentor. Entre deux visites de proximité, il s’est confié avant-hier à ‘’EnQuête’’.

 

Quel bilan tirez-vous après dix jours de campagne ?

Je me réjouis de voir qu’après dix jours de campagne, la démocratie sénégalaise fonctionne très bien, parce que les leaders se sont déployés à l’intérieur du pays et partout dans les quatorze régions du Sénégal. Une dynamique de campagne qui se déroule dans un esprit serein, notamment ici à Dakar où les choses se passent très bien. Mais, au-delà, les cadres du Sénégal, particulièrement ceux de Benno Bokk Yaakaar, participent à cette campagne. Cette dernière est d’un niveau de réflexion et de partage assez correct. Ce qui est tout à l’honneur de la démocratie sénégalaise. Il y a quand même à regretter ce qui s’est passé à Tamba en termes de violence et qui risque, malheureusement, d’être le point noir de cette campagne qui devait être l’une des campagnes les plus civilisées et les plus élevées en termes de niveau, parce qu’il n’y a que cinq candidats. Chacun est venu avec son approche et sa spécificité, et cela pouvait être une campagne très intéressante. Malheureusement, il s’est passé des choses très regrettables.

Justement, il a eu de la violence à Tambacounda et l’on a dénombré 2 morts. Ne pensez-vous pas que l’Etat a sa part de responsabilité dans ce qui s’est passé ?

On ne peut pas dire que l’Etat a failli dans sa mission de protection des citoyens, loin de là. Je me réjouis de cette mesure importante (Ndlr : l’Etat assure désormais la sécurité des candidats) prise à la suite de ce qui s’est passé à Tamba et qui, je l’espère, est un fait isolé survenu lors d’un concours de circonstances. Cela ne peut donc pas être un fait marquant et caractéristique de la démocratie sénégalaise. L’Etat n’a pas failli, parce que les dispositions ont été prises pour assurer la sécurité de tous. Cependant, ce qu’il faut noter, c’est que certains candidats ou leaders qui ne sont pas candidats ont surfé de manière extraordinaire et irresponsable sur une vague de violence avec des appels directs ou indirects à la violence. Quand on demande de brûler les cartes d’électeur, quand on dit qu’il n’y aura pas d’élection, quand on a un message allant dans le sens d’appeler au boycott, tout cela est un terreau très fertile pour la violence. Je trouve que certains candidats ou leaders politiques qui ne sont pas candidats ont tout intérêt à ce que la violence s’installe. La question qu’il faut se poser, c’est à qui profite le crime ?

Vous êtes donc du même avis que votre candidat qui indexe l’opposition…

Vous savez que la violence n’est pas une chose qui tombe du ciel. Elle est la résultante d’un certain nombre de facteurs. Le point de vue des leaders, en termes de message, de démarche et d’attitude, influence beaucoup les masses. Moi, je pense que quand on est leader, on doit savoir que tout acte posé, toute phrase prononcée, toute position prise, ont une influence directe sur le comportement des masses. Je suis de ceux qui pensent qu’il s’est passé dans le pays des déclarations, des prises de position et des attitudes qui, directement ou indirectement, ont appelé les Sénégalais à verser dans la violence.

A maintes reprises, des militants de Benno Bokk Yaakaar ont été cités dans des attaques contre des caravanes de l’opposition. Vous avez vous-même été accusé d’avoir saccagé le siège de Pastef à Yoff. Où en est l’enquête et que répondez-vous à ces accusations ?

Je crois que cette question du supposé saccage du siège de Pastef, les Sénégalais l’ont vite traitée et ont compris que c’est une machination politique dans le cadre d’une stratégie de victimisation. Je ne suis vraiment pas disposé à en parler, parce que j’ai été le premier surpris par cette histoire. Cela veut simplement dire que sur les autres questions, c’est exactement la même chose. Il y a des perdants qui sont en train de chercher les arguments pour justifier leur défaite future. Cela ne me parait pas responsable. La démocratie sénégalaise est une démocratie majeure. Les Sénégalais ont commencé à voter depuis très longtemps. Il faut absolument que certains se rendent compte que le Sénégalais est réfléchi ; il attend les programmes, observe et prend ses décisions en toute responsabilité. Que les gens sachent que le monde nous regarde.

L’ex-maire de Dakar, Khalifa Ababacar Sall, a décidé de soutenir  le candidat  Idrissa Seck. Cela ne risque-t-il pas de vous compliquer la tâche à Dakar ?

Non, pas du tout. Il me semble même que c’est cet appel à l’endroit d’Idrissa Seck qui est en train d’éclaircir beaucoup de choses. D’ailleurs, de nombreux militants de Taxawu Ndakaru sont en train de se poser des questions et de dire de manière claire qu’il n’est pas question pour eux d’accompagner Idrissa Seck. Khalifa a quelque part déçu ses militants dans sa prise de position, et beaucoup de militants de Taxawu Ndakaru préfèrent rejoindre le président Macky Sall dans leur localité et travailler dans la continuité de ce combat pour l’émergence. Je pense donc que cette position de l’ex-maire de Dakar n’est pas très comprise par les populations et par ses militants. D’ailleurs, si vous remarquez bien, il n’y a qu’un seul responsable de premier plan de Taxawu Ndakaru qui s’est prononcé et de manière assez claire : Barthélémy Dias.  Et on comprend sa philosophie. Mais compte tenu des positions de Moussa Sy, Banda Diop, du maire de Hann, de Cheikh Guèye…, les gens se demandent pourquoi le staff du maire n’a pas immédiatement relayé cette consigne. C’est parce que, quelque part, il y a une gêne par rapport à cette position. Il aurait été préférable, pour Khalifa, qu’il soit neutre. Il aurait été mieux compris. Sa consigne n’est pas cohérente.

 Est-ce à dire que le soutien de Khalifa Sall et de ses partisans au leader du Rewmi est loin de vous ébranler ?

Non, ce soutien ne nous ébranle pas parce qu’il n’est pas compris. Les militants de Taxawu Ndakaru sont véritablement en train de venir chez nous, dans la mesure où, pour Dakar, le choix d’Idrissa Seck ne peut être pertinent. Il a été Premier ministre très puissant dans ce pays. A cette époque, Dakar n’était pas considérée par lui. Ce n’est pas en étant président de la République qu’il sera aux côtés des Dakarois pour un développement de notre territoire.

Lors des dernières législatives, la coalition Benno Bokk Yaakaar à Dakar était entre 33 et 34 %. Comment comptez-vous combler ce gap, puisque vous tenez à gagner dès le premier tour ?

Nous allons combler ce gap, s’il y a gap, par un apport extrêmement important du candidat Macky Sall. Il s’agit d’une élection présidentielle. Chacun de nous a son potentiel local pour être en phase avec l’Acte 3 de la décentralisation. Mais le président Macky Sall a la grande famille du Sénégal émergent. Ce sont des Sénégalais qui, partout dans le pays, estiment qu’il lui faut continuer le très bon travail qu’il a entamé. On ne change pas une équipe qui gagne. Somme toute, nous sommes convaincus qu’à Dakar, nous aurons une majorité absolue. Notre ‘’famille’’ ne se limite pas à Benno Bokk Yaakaar ; elle s’étend à tous nos alliés. Aux Parcelles, l’apport du maire Moussa Sy sera déterminant. A la Patte d’Oie, le maire qui n’était pas avec nous est maintenant très actif à nos côtés. C’est ce qui se passe aussi au niveau de Ouakam et dans toutes les communes. Ce potentiel territorial va être amplifié par l’apport extraordinaire du candidat qui est très aimé par les Dakarois. Ces derniers l’attendent pour le plébisciter au soir du 24 février prochain.

D’autres responsables de l’Apr, comme les ministres Amadou Ba et Mame Mbaye Niang sont, eux aussi,  en train de battre campagne à Dakar. Est-ce une stratégie de  la coalition présidentielle ou la conséquence  de la guerre de leadership pour le contrôle de la capitale ?

Il ne peut pas y avoir de divergence quand on a la même cible. Chacun, à sa manière, attaque la cible avec sa stratégie, ses moyens, son style. Finalement, quand tout le monde atteint la cible, elle est écrasée. Nous sommes dans une élection présidentielle et le mot d’ordre est l’unité, la solidarité. C’est ce que nous sommes en train de faire. Notre objectif, c’est de faire réélire le président Macky Sall.

Oui, mais le président Sall  a déclaré, avant-hier, à Bounkiling, que son problème, ce n’est pas l’opposition, mais l’unité de son parti. Est-ce à dire qu’il y a des divergences en votre sein ?

A Dakar, les choses se passent très bien. Peut-être que c’est une manière pour le chef de l’Etat d’alerter les leaders de certaines zones où il n’y aurait pas d’efficacité fonctionnelle. Je suis rassuré et ces messages sont à répéter afin qu’à l’avenir les gens comprennent que c’est dans l’unité qu’on peut réaliser les grandes victoires. En tout cas, à Dakar, nous sommes unis  et il n’y a pas de doute, la victoire est certaine. Aujourd’hui, nous sommes dans une stratégie de positionnement par rapport au score.

Ibrahima Khalil Wade

 

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