Publié le 26 Jan 2014 - 22:18
HAMIDOU DIA (PHILOSOPHE)

«Il n'y a pas de rupture (éthique) dans ce pays»

 

‘’Il n'y a pas de rupture sur le plan de l’éthique dans ce pays (…) Les gens ont fait partir Abdoulaye Wade du pouvoir, mais les mêmes habitudes restent’’. Tel est le constat fait le Pr. Hamidou Dia. Il l’a déclaré hier, au cours du panel organisé par le Comité d’initiatives des intellectuels du Sénégal (CIIS) à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar.

Le célèbre philosophe dit regretter l’existence de ‘’l’argent sale, (de) l’argent pourri’’ dans le pays malgré le changement de régime. Une situation qu'il explique par ‘’nos comportements’’. Avec cet avertissement : ’’Quel que soit le président que nous aurons, il n’y aura pas de rupture si les pesanteurs sociales ne sont pas éradiquées’’, analyse d’un œil philosophe le Pr. Dia.

Le coordonnateur du M23 semble trouver une réponse à cette préoccupation en invitant à ‘’déconstruire nos habitudes’’. Car, dit Mamadou Mbodji, ‘’nous avons une tendance forte au mimétisme’’ qui nous empêche d’avancer. D’où la nécessité pour les intellectuels sénégalais de s’impliquer davantage dans les débats qui interpellent la nation, préconise Sokhna Benga.

Reprenant à son compte le thème ‘’La seconde alternance à la croisée des chemins : quelles misions et rôles des intellectuels ?’’, l’écrivaine constate, pour le déplorer,  que ‘’les intellectuels ont reculé devant les médiocres à tel enseigne que ceux qui tentent de dire la vérité ne le peuvent pas’’. Pire, poursuit-elle, ‘’quand le médiocre arrive au pouvoir, il a tendance à écraser tout le monde’’.

Une logique à laquelle le M23 compte s’opposer. Et le message de son coordonnateur est sans ambages. ‘’Notre attitude n’est pas de défiance (à l’Etat), elle est critique. Tout ce qui va dans le sens l’intérêt du Sénégal, nous le saluerons. Par contre, tout ce qui ne l’est pas, nous allons nous y opposer’’, souligne Mamadou Mbodj.

«Médiation pénale = prime au vol»

Comme c’est par exemple le cas avec la médiation pénale assimilée à une ‘’prime au vol’’. ‘’Il ne faut pas qu’on donne la possibilité à quelqu’un de dire : j’ai volé 10 milliards, mais je vous restitue les 8 milliards’’, déclare Aboubakry Mbodj, secrétaire général de la Raddho.

Seydi Ababacar Ndiaye, secrétaire général du Syndicat autonome des enseignants du Supérieur (SAES), pour sa part, demande à Macky Sall de «répondre à l’interpellation des intellectuels» qu’il a reçus à la salle des Banquets il y a quelque jours. Mettant un bémol à l’optimisme affiché par son collègue Malick Ndiaye - ce dernier a distribué ‘’l’adresse’’ du président de la République aux intellectuels à l’assistance -, il a déclaré : «Nous ne sommes pas là pour plaire au président.

Tant qu’il ne répond pas aux intellectuels, il y aura toujours des problèmes.’’ Pour lui, ‘’la rupture ne doit pas être un slogan’’; ce qui est malheureusement le cas, constate-t-il,  avec Macky Sall dont il garde encore la réponse servie à Nafi Ngom Keïta en recevant le rapport de l’Inspection générale d’Etat en 2013.

«Défis majeurs»

«Ce qui  m’embête, dit-il, c’est quand le président dit : 'Je n’ai pas d’ordre à recevoir (de Nafi Ngom). C’est à moi d’apprécier si je dois transmettre ou non un rapport.' Ce n’est pas ce qu’on attend de lui‘’, dit le responsable du SAES.

Comme pour ramener toute le monde sur un point de convergence, le Pr. Iba Der Thiam rappelle que le Sénégal a des ‘’défis majeurs à relever’’ dans un contexte géopolitique difficile. Et l’un de ces défis, c’est de reprendre sa place de leadership au niveau sous-régional. Ce qui fait dire au Pr. Malick Ndiaye, qu’une ‘’nouvelle ère’’ exige ‘’un symbole nouveau’’.

‘’Satisfait’’ de la qualité des débats, le ministre conseiller spécial du président Macky Sall a promis de délocaliser ces panels dans les autres universités du pays.

DAOUDA GBAYA

 

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