Publié le 19 Mar 2024 - 14:53
DEVOIR CIVIQUE & ABSTENTION ELECTORALE

Une démocratie sans électeurs, signe d’une crise ?

 

La pratique électorale est devenue majoritairement intermittente au Sénégal. Malgré l’absence d’études, d’enquêtes et ou de sondages disponibles sur la typologie des abstentionnistes, les électeurs ne se déplacent plus en masse pour effectuer leur devoir civique. Les citoyens Sénégalais appelés à effectuer leur devoir civique le dimanche 24 mars 2024 pour élire leur 5e président de la république parmi les 18 candidats en compétition se feront- ils encore désirer ?

 

Les cartes d’électeurs encore en souffrance au niveau des commissions administratives de distribution dédiées en perspective du scrutin présidentiel du dimanche 24 mars courant ont remis au goût du jour le manque d’engouement de plus en plus poussé des citoyens à l’égard de la chose politique. Si le scrutin présidentiel continue toujours de mobiliser au Sénégal, les Législatives et les Territoriales le sont moins. Au regard du fort taux d’abstention qui va crescendo d’élection en élection, les acteurs politiques n’ont jamais daigné pousser la réflexion ou réaliser des enquêtes sur les vraies raisons de la démobilisation des électeurs. Qu’est-ce qui peut bien expliquer l’abstentionnisme qui va crescendo d’élection en élection ? La question n’a jamais été évoquée par les parties prenantes lors des différents travaux de la commission cellulaire du dialogue politique. Le sentiment de manque de légitimité politique, qui semble caractériser les candidats, expliquerait-il leur peine à convaincre les électeurs ? Cet écart de participation historiquement faible est le signe d’une crise démocratique. En effet, une démocratie sans électeurs n’est pas une démocratie. Elle est affaiblie quand les électeurs ne vont pas voter massivement. Ce désamour persistant des citoyens, surtout des masses populaires, doit inquiéter plus d’un démocrate. Même si voter n’est pas une obligation, l’élection doit être un sursaut national, un devoir civique pour tout citoyen. Selon le journaliste politologue Bakary Domingo Mané, spécialisé en marketing politique, « le recul de la participation aux élections traduit le grand malaise des citoyens qui nourrissent une profonde défiance de la classe politique avec des candidats à la présidentielle qui peinent toujours à s’adresser aux électeurs ». En outre, « l’abstention témoigne d’un sentiment de déconnexion de la classe politique ».  A cet effet, durant les campagnes électorales de ces dernières années, « la parole politique s’est focalisée sur des préoccupations autres que les enjeux de l’heure et les questions d’intérêt national ».

Des raisons profondes de la démobilisation

La Fondation Jean-Jaurès, dans une étude qualitative menée auprès de personnes s’étant abstenues, a relevé quatre types de causes de leur non-participation aux joutes électorales. Il s’agit de « la perte de foi (impuissance de la politique, inutilité du vote) et le fossé (déconnexion et manque de sincérité des politiques), les carences démocratiques (freins administratifs, manque d’information) et l’éthos des politiques (agressivité, politique-spectacle). En outre, il y’a « un rapport dégradé aux médias et à l’information ». Selon l’étude, « entre overdose et dépendance vis-à-vis de la télévision, les abstentionnistes expriment une forme d’angoisse face à une offre médiatique pléthorique et considérée comme orientée ». In fine, « ils se tournent vers leurs proches pour se forger une opinion et préfèrent regarder des émissions d’infotainment, dans un rapport plus léger à la politique ». Ainsi, pour lutter contre le désengagement des citoyens envers la politique et au risque de voir des prétendants à la conquête des suffrages déchanter, il convient, pendant qu’il est encore temps, de convaincre les électeurs à se déplacer pour aller voter, leur expliquer que la politique a du sens et que les principaux acteurs arrêtent de dévoyer la politique. Un projet de loi ou une proposition de loi rendant obligatoire le vote et/ou pour imposer un seuil de participation pour qu’une élection soit validée ne serait pas une idée saugrenue pour une évolution de notre modèle démocratique.

Malamine CISSE

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