Publié le 8 Aug 2025 - 18:14
“ADOU KALPÉ”, “ILLÉGAL”, “SAUPOUDRAGE”

L’APR déchire le plan “Jubbanti Koom”

 

L’Alliance pour la République, analysant le plan de redressement ‘’Jubbanti Koom’’, dénonce une ‘’légèreté et (une) violation flagrante de l’esprit de la République’’. Il fustige  un ‘’adou kalpé’’ et un ‘’saupoudrage’’.

 

L’Alliance pour la République a fait une analyse du "Plan dit de redressement économique et social" présenté par le Premier ministre Ousmane Sonko, le 1er août.

Parlant du contenu, l’APR estime qu’il renvoie "aux heures les plus sombres de notre histoire", car ce plan ne signifie ni plus ni moins qu’un ajustement structurel "volontaire", dont "les conséquences seront catastrophiques pour les entreprises, les ménages". Le parti de Macky Sall explique : ‘’Sous prétexte d’atteindre l’objectif de réduire le déficit à 3 % en 2027, ce plan va asphyxier les travailleurs, les précaires, les artisans, les paysans, les femmes, les influenceurs...’’

Et selon Mame Guèye Diop, porte-parole adjoint, il n’offre aucune perspective en matière de sécurité sociale, d’accès à l’électricité, à l’eau potable, aux routes praticables, au crédit ou aux formations adaptées.

Pour elle, avec ce document, le gouvernement va affecter ‘’négativement’’   le transport, avec les taxes à l’importation et les droits d’accises, les loisirs, à travers les jeux et le tabac, le monde rural (avec les taxes à l’exportation sur les produits agricoles et le foncier rural) ; les actifs stratégiques de l’État ‘’pour l’essentiel déjà sous concession’’ ;  la cession des actifs fonciers, notamment en milieu rural, etc.

L’APR attire l’attention sur un domaine qui relève de la sécurité nationale. Le parti insiste sur le sujet du recyclage d’actifs, notamment des emprises rétrocédées par les militaires français souvent contigus à des domaines militaires sénégalais (État-major terre, marine nationale). ‘’Ces points stratégiques doivent être des réserves pour les capacités futures de nos armées qui obéissent à une montée progressive en puissance", indique Mame Guèye Diop.

‘’Un État qui ne donne rien, exige tout, mais…’’

Le gouvernement espère mobiliser 600 milliards F CFA à partir du monde rural, ‘’sous prétexte de lui délivrer un titre dont la nature reste floue". D’après Mme Diop, cela est non seulement irréaliste, mais surtout ‘’injuste’’.  Elle déclare : ‘’Ce monde rural, qui concentre l’essentiel des terres du domaine national, est pauvre, vulnérable et déjà privé des bourses de sécurité familiale qui assuraient pour beaucoup un filet de survie grâce à la vision sociale du président Macky Sall.’’

Elle soutient que les 600 milliards F CFA exigés désormais, c’est l’équivalent de cinq campagnes agricoles.  Or, ‘’les paysans n’arrivent même pas, pour une majorité d'entre eux, à financer leur part dans l’achat de semences ou d’engrais. C’est une fiscalisation à outrance sans précédent’’, regrette Mame Guèye Diop.

Et d’ajouter : ‘’Ceux  qui seront incapables de payer deviendront des proies faciles pour les prédateurs fonciers. On prétend leur ‘donner un droit’, mais en réalité, on organise leur dépossession future avec un risque réel de privatisation des zones de terroirs qui sont pour l’essentiel des terres à usage agricole et pastoral. Or, la souveraineté alimentaire, tant proclamée et qui passe nécessairement par la sécurisation des terres arables, devient hypothétique".

Mame Guèye Diop note que dans un rapport officiel du gouvernement  américain, les chiffres catastrophiques de la campagne arachidière sont mis à nu.

En effet, les données statistiques révèlent que ‘’la production d'arachide pour la campagne de commercialisation 2024-2025 est à 731 000 t, soit une baisse de plus de 56 % par rapport à l'année précédente où le chiffre était de 1 675 329 t".

Ceci, regrette-t-elle, malgré l'augmentation de l'enveloppe de la campagne agricole qui serait passée de 100 milliards à 120 milliards F CFA. À titre de comparaison, ‘’avec 100 milliards, la campagne agricole 2023-2024 a permis de récolter 1,6 million de tonnes d’arachide’’, dit-elle.

 Par rapport au choix du gouvernement de supprimer les subventions et de remettre en cause certaines exonérations fiscales, l’APR soutient qu’il devait plutôt cibler les niches inutiles ou les privilèges injustifiés.

Ces mesures, selon Mame Guèye Diop, risquent de frapper de plein fouet les ménages, à travers la hausse des prix des produits de base et un secteur privé fragilisé, qui manque de visibilité et de liquidités. ‘’En clair, on compense l’inaction de l’État par l’effort des plus faibles, pendant que les vrais centres de rationalisation restent intouchés", fustige-t-elle. ‘’Autrefois, l’État aidait les citoyens. Aujourd’hui, l’État se contente de les pressurer. On a connu l’État-providence. Voici venu l’État ‘adou kalpé’, un État qui ne donne rien, exige tout, mais n’assume aucune responsabilité’’, regrette Mame Guèye Diop.

‘’Tous les chiffres annoncés sont confus et contradictoires…’’

En termes de chiffrage, Omar Youm et Cie relève que le Plan de redressement est annoncé tantôt à 5 667 milliards, tantôt à 6 202 milliards F CFA. ‘’Cette différence de plus de 500 milliards montre l’absence de sérieux et l’amateurisme du régime. Globalement, tous les chiffres annoncés sont erronés, confus et contradictoires". 

Ils notent que le gouvernement, reprenant la banque Barclays, évoque une dette de 119 % sans que ce chiffre ne figure dans un document officiel. "Or, pour la Cour des comptes, dans un rapport que nous contestons du reste, la dette est estimée à 99 % du PIB", indiquent les membres de l’APR. Pour eux, c’est pour maintenir le flou et la confusion que le gouvernement n’a pas publié depuis juin 2024 des bulletins statistiques sur la dette. "La vérité est que ce régime a emprunté 10 200 milliards en deux ans et a investi pour deux milliards en 2025", disent-ils.

L’APR fait remarquer que dans  le volume de financement du plan, l’effort budgétaire de l’État ne dépasse pas 100 milliards, soit de 2 % du total. "Comme si on demandait au peuple de relancer seul l’économie, pendant que l’État se contente de commentaires et de promesses confortablement jaloux de son confort et des privilèges", déplore le parti.

‘’Le gouvernement sanctuarise son train de vie pour élaborer le plus grand plan de matraquage fiscal à destination des entreprises, des ménages, des agents et fonctionnaires du secteur public ainsi que des travailleurs du secteur privé, des travailleurs du secteur informel et ceux du monde rural’’, regrettent Oumar Youm, Pape Malick Ndour et Cie. Ils notent que le plan ne précise pas la répartition des ressources sur les trois ans de mise en œuvre ni même sur les secteurs ciblés.

Pourtant, disent-ils, il indique, avec une contradiction, la répartition des recettes fiscales attendues d'une augmentation des recettes collectées à 4 605 milliards F CFA. L’APR dénonce une démarche injuste.

 Un plan ‘’illégal’’

 Par ailleurs, sur la forme, il  le juge  ‘’illégal’’. L’APR souligne que le Pres s'érige comme référentiel du pays, en lieu et place du PSE, une loi de la République votée par l'Assemblée nationale.

En outre, l’APR renseigne que la Constitution sénégalaise, en son article 42, édicte que "le président de la République détermine la politique de la nation". Or, des mots mêmes du chef de l’État, ‘’le Pres a été conçu par le PM et ses équipes…’’.

 Autre élément de ‘’l’illégalité : le cadre d'expression de l'exercice. Cette démarche ridicule, devant un parterre d'affidés, participe de cette posture de défiance et de négation des institutions républicaines, clairement assumée par le pouvoir national-populiste’’, peste l’APR.

BABACAR SY SEYE 

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